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Le Chemin prend quelques vacances… une sieste qui durera une huitaine de jours…

à bientôt.

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raboliot_15« Un matin que j’étais en visite chez un ami, on vint m’informer soudain que vingt soldats de l’armée Rouge cernaient ma demeure pour m’arrêter et qu’il me fallait fuir sur le champ. Aussitôt j’empruntai un vieux costume de chasse à mon ami et, muni d’une petite somme d’argent, m’échappai en toute hâte, à pied, par les petites rues de la ville. J’atteignis bientôt la grand’route et engageai les services d’un paysan qui, en quatre heures, m’avait transporté à une trentaine de verstes et déposé au milieu d’une région très boisée. En chemin, j’avais acheté un fusil, trois cents cartouches, une hache, un couteau, un manteau en peau de mouton, du thé, du sel, des biscuits et une bouilloire. Je m’enfonçai au cœur de la forêt et parvins à une cabane abandonnée, à moitié calcinée. Dès ce jour, je menai l’existence d’un trappeur, mais j’étais bien loin de me douter à quel point cet état forcé allait se prolonger. »

Ferdynand Ossendowski. Bêtes, Hommes et Dieux. Phébus.

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« Marseille devint la ville du Bureau Populaire, personne n’y pouvait respirer sans son autorisation. Il possédait tout, y compris les usines vers lesquelles se traînaient chaque matin un peuple d’esclaves à l’échine courbée. Pourtant -chose remarquable- il continuait à gloser interminablement sur les idéaux qui avaient présidé à sa création : entraide, justice pour les opprimés, lutte contre les profiteurs. Les hommes du Bureau employaient d’ailleurs et imposaient un langage étrange et comme en suspens puisqu’il ne recouvrait rien de réel, vocable abstrait à la fois flottant et pénible. Ils employaient sans cesse des mots comme justice ou liberté alors qu’ils étaient les premiers exploiteurs et les premiers geôliers. Ils parlaient d’avenir radieux alors que le futur s’assombrissait de plus en plus. Le ciel se couvrait à nouveau des mêmes nuages qui avaient provoqué l’immense catastrophe -et les mêmes bombes menaçaient à nouveau d’exploser.

La méfiance du Bureau était extrême pour tout ce qui était obscur, irrationnel, magique. Il fallait contraindre l’individu à vivre dans le deux-pièces cuisine de son mental, l’empêcher de s’explorer lui-même et de découvrir -une fois la trappe soulevée- les palais merveilleux, palais aux richesses insoupçonnées qu’il suffisait de parcourir une seule fois pour ramener à la clarté du jour de surprenantes œuvres d’art : sémaphores à visage d’ange, libellules chantantes, griffons, dieux anciens et oubliés qui prenaient aussitôt la parole pour vous confier les messages de l’éternité. Un tel individu soudain conscient du caractère innombrable de ses domaines -satrapies, fiefs, sultanats, principautés- devenait naturellement indifférent aux enseignements du Bureau . Il n’était plus contrôlable. Il émigrait sans bouger.

C’était ce que le Bureau ne pouvait accepter. Il ne voulait pas régner sur une société d’hommes libres mais sur la masse. En clouant l’individu à son mental, en l’empêchant de communiquer avec les autres niveaux de lui-même, il en faisait sa créature. Tous ceux qui encourageaient l’homme à se tourner vers son être profond étaient les ennemis du Bureau. L’artiste par exemple, qui ouvrait les univers cachés, utilisait les images scandaleuses que lui chuchotaient ses rêves et transmuait en beauté la subversion des abîmes, était désigné comme anormal et voué à la camisole. »

Christian Charrière. La Forêt d’Iscambe. Phébus.

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Volkisch« Il fallait vraiment que le christianisme corresponde à un plan précis pour qu’il connaisse une telle extension. S’il n’avait été que le fruit de la révolte d’un fils de charpentier, il aurait été confiné dans le désert et le soleil aurait fini par le dessécher. Le christianisme naissant prit fin à la mort de Jésus pour autant que celui-ci ait véritablement existé mais d’autres disciples, se servant de lui comme d’un prétexte, prirent en main la nouvelle religion. Elle se propagea alors comme un foyer infectieux qui ne connaît ni frontière ni barrière. A l’époque il n’y avait guère que la force alliée à l’intelligence pour s’imposer et se maintenir. Ne possédant que la faiblesse et la ruse et armée de ses seules légions de mendiants, la chrétienté, rêvant d’un pouvoir sans partage, inventa des mots. Puis, ces mots se propagèrent car des millions de bouches affamées les prononcèrent, en donnant l’assaut à toutes les aristocraties et à une race, dont la créativité et la joie faisaient le ressentiment des autres. L’église accoucha de concepts qui n’avaient de réalité que celle que ses fous voulurent leur donner. La force devint une faiblesse et toutes les faiblesses furent élevées au rang de vertus. Les gémissements et les plaintes enfantèrent l’égalité, la compassion, le pardon et l’humilité. On louait ceux qui en usaient alors que leur propre nature ne leur permettait pas, de toute façon, d’agir autrement. Toutes ces valeurs pouvaient incarner la force quand elles constituaient le choix des forts mais elles n’étaient que faiblesse quand elles n’étaient que l’obligation des faibles ! L’homme devenait un coupable éternel qui ne pouvait se racheter qu’en brimant ses instincts et en suivant des préceptes que le créateur lui-même avait accouché. Au début, l’homme blanc ne vit pas les tenants et les aboutissants car chacun pensait pouvoir tirer son épingle du jeu, mais déjà son âme ne lui appartenait plus. L’église rongeait le pouvoir et la vitalité comme la gangrène s’acharne sur une jambe malade. Chaque jour, elle semait la graine du désaccord, rendant l’homme de plus en plus faible et dépendant. Personne ne comprit qu’il ne s’agissait pas d’une lutte de pouvoir comme les autres. La chrétienté n’avait que faire du corps, elle s’attaquait aux instincts et à l’âme. Tout le reste lui serait dû une fois qu’elle les aurait vaincus. Petit à petit elle devint tellement puissante qu’elle en vint à tout réguler. Elle était la pensée du pouvoir temporel et l’essence du pouvoir spirituel. Plus rien, du plus anodin au plus crucial, ne se faisait sans elle. Chacun devait la reconnaître et se soumettre s’il ne voulait encourir l’ostracisme. L’église avait gagné ! Elle était la maîtresse de toute une race, qui trompée, s’accommodait à grand coup de mixtures et de cuisine de la nouvelle religion. Enfin l’homme blanc connaissait la peur et il n’osa, par crainte que son âme soit emportée, combattre cette invasion au fil,de l’épée. Il avait rendu les armes et ses pensées et son corps ne lui appartenaient plus. La force brimée soufflait sur les braises des bûchers pour que périssent vingt millions d’hérétiques. Les rois avaient troqué leurs couronnes d’or richement ornées pour des couronnes d’épines et leurs sceptres n’étaient plus qu’un sabre qui ôtaient la vie à des frères de sang, sous le regard satisfait d’un dieu unique qui voyait son empire s’agrandir outrageusement. L’homme n’était plus le fils de la nature mais l’enfant d’un dieu incréé qui confisquait dans sa main le sacré. Les lois de l’éternel recommencement ne le concernait plus car les faibles ne pouvaient s’y soumettre sans risque d’y périr. Soumis à aucune autre loi que les siennes propres car il en était l’essence, la légitimité de ce nouveau juge ne serait jamais remise en cause. Enfin le faible prenait une revanche sanglante et s’asseyait sur le trône des empereurs. »

L’Ami. Mon sang m’a dit. Les Amis de la Culture Européenne.

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« Voilà bien l’église. Tout ce qu’elle n’a pu corrompre à son profit, elle le marque du sceau de l’énigme, du hasard ou de celui de l’infamie. Cette chapelle fut édifiée il y a huit cents ans sur un ancien lieu de culte où les hommes venaient se retrouver avec les Dieux. Après avoir répandu la mort pour interdire cette communion, la chrétienté pensa qu’il lui fallait mieux utiliser ce site ancien pour tenter de convertir les hérétiques qui continuaient leurs pratiques au plus profond des forêts. Chaque pierre fut caressée et modelée par les quelques compagnons qui avaient accepté de besogner à la condition de pouvoir y laisser leurs signes. L’église nécessiteuse car désireuse d’asseoir définitivement un pouvoir spirituel chancelant, ferma les yeux devant le grand avantage qu’elle en tirerait. Ces signes immémoriaux et intemporels attirèrent finalement une multitude de récalcitrants qui finirent par voir dans le christianisme la continuité de l’esprit des forêts. Mais il n’en était rien. Comment cette doctrine et cette communion auraient-elles pu être la continuité l’une de l’autre alors que la première, jaillit du sol craquelé du désert, était le fruit de l’aigreur et du ressentiment et que l’autre avait été enfantée par le soleil, la montagne et les forêts. L’église, pour la combattre, dut même la nommer car l’éternité du rite n’avait pas permis qu’un nom lui fut donné. Les fées l’avaient enfanté avant que les mots n’existent. Le paganisme appartenait aux païens et vivait en dehors de tout concept car la seule réalité qu’il honorait était la vie. Le christianisme, lui, n’honorait personne. Il enchaînait les hommes, les esclaves mais aussi les maîtres, par des fables et des mensonges. Mais les rêves n’alimentaient que les croyances, et les théories et le savoir s’échappaient comme le paradis échappera à ces cohortes de gens qui utilisent la bonne action comme une assurance sur le futur passage. Le sens et la substance bafoués, la force qui reliait la terre au ciel s’en fut rejoindre le monde souterrain en attendant le moment où elle pourrait de nouveau circuler à travers un homme qui, voulant toucher le soleil, pourrait devenir un Dieu. »

L’Ami. Mon sang m’a dit. Les Amis de la Culture Européenne.

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« La société guerrière que représentait l’Europe s’était éteinte sous le voile de la croix et d’une morale prétendument divine propre à régenter les rapports barbares, et le loup incarnant la barbarie féroce avait cessé d’en orner les bannières. On avait détruit les hommes forts, il fallait anéantir leurs symboles. La fureur des hommes pieux poursuivit le loup jusqu’à le faire disparaître complètement.

Au respect qu’imposaient sa force et ses pratiques sociales, l’église y substitua la haine. A défaut d’exister, elle inventa des attaques qui ne vivaient que dans ses cauchemars. Le loup devint un mangeur d’innocents, un rôdeur qui dévorait les enfants et ne se trouvait repu que lorsqu’il s’était gavé de chair humaine. Les fables animalières l’affublaient de tous les défauts, l’homme exorcisant ses pitoyables travers dans la recherche du bouc émissaire biblique. L’homme y avait vu un farouche concurrent, l’église un démon car représentant sans doute une image par trop parfaite de la force et de la beauté. En détruisant l’animal mythique et en le rangeant du côté du mal, l’homme ne prendrait plus exemple sur lui. L’Église préférait gouverner des agneaux plutôt que des loups. »

L’Ami. Mon sang m’a dit. Les Amis de la Culture Européenne.

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dessin-enfants-bagarre« Le système avait foulé aux pieds tous ces bons préceptes de droit et de justice auxquels tous ces laquais croyaient dur comme fer. Eux qui pensaient que la guerre venait d’un manque de compréhension entre les hommes, eux qui niaient les différences en croyant les louer, eux qui voyaient en chaque homme un être digne de considération et de compassion, ceux-là s’étaient versé dans l’écologie en pensant qu’il suffisait de trier ses déchets. Mais l’écologie, la vraie, représentait l’harmonie totale de l’homme et de la nature. Elle impliquait la remise en cause complète de la place de l’être humain et de ses prérogatives sur la terre. La nature n’était pas un jardin d’enfants où on obligeait le plus grand à respecter le petit en ne lui prenant pas son goûter. Non, la nature était violente et cruelle car sans violence et sans cruauté, l’équilibre se serait rompu et tout aurait sombré dans l’inerte et le néant. Elle était une magie, un lieu de conflit perpétuel où le racisme et la force faisaient loi car il n’y avait que de tels instincts pour dispenser la lumière vitale. Et l’homme écologiste, en accord avec son écosystème, était soumis à ces lois et toute la raison du monde n’y pouvait rien changer. Le système savait tout cela, aussi avait-il créé l’écologie politique comme une nouvelle facette de son emprise afin de capter encore quelques bonnes volontés et souiller leur pureté originelle. »

L’Ami. Mon sang m’a dit. Les Amis de la Culture Européenne.

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Dominique Venner, que nous sommes nombreux à considérer comme un maître, notamment dans sa manière d’appréhender l’Histoire, est né le 16 avril 1935 à Paris. C’est donc son anniversaire.

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« C’est un sujet passionnant, très actuel et mal connu que la naissance des révolutions. Il avait été étudié par le sociologue Jules Monnerot (1908-1995) après les événements français de Mai 68 dans son livre Sociologie de la Révolution (Fayard, 1969). Travail précieux pour lequel son auteur a forgé une série de concepts applicables à toutes les situations.

S’agissant d’une étude sociologique et non d’une histoire des idées, Monnerot use d’une seule appellation, sans ignorer bien entendu tout ce qui sépare et oppose les différentes révolutions du XXe siècle, bolchevisme, fascisme italien, national-socialisme allemand, révolution de 1944, ou celle de 1968. Il estime en effet que ces phénomènes de foule relèvent de la même analyse sociologique, tout en faisant une nette différence entre révolutions de type conservatrice et révolutions déconstructrices.

Mais d’abord, Monnerot définit quelques concepts applicables à toute révolution. En premier lieu la « situation historique ». Elle est celle que l’on ne reverra jamais deux fois. C’est vrai pour 1789, 1917, 1922, 1933 ou 1968. Autre notion complémentaire : la « situation de détresse ». Elle se caractérise par des troubles non maîtrisés. La structure sociale se défait : les éléments ne sont plus à leur place.

Quand une société est stable, on y distingue des éléments sociaux normaux (« homogènes ») et des marginaux (« hétérogènes »). Les éléments marginaux sont en marge parce qu’ils y sont maintenus par la pression des éléments « homogènes ». Lorsqu’un seuil critique de bouleversement est atteint, la partie homogène commence à se dissocier. On observe alors comme une contagion de chaos.

Remarque intéressante qui s’applique aux révolutions conservatrices : « l’homogène, même en voie de dissociation, reste l’homogène ». Quand le bouleversement est radical, « du fond même de la société monte une demande de pouvoir ». Le fascisme, en 1922 ou 1933, fut par exemple une réponse à cette demande dans une société ayant un haut développement (industrie, sciences, culture). Dans une telle société, quand l’ordre s’est effondré, les éléments conservateurs (homogènes) deviennent provisoirement révolutionnaires par aspiration à l’ordre et demande de pouvoir.

Comment aboutit-on à une « situation révolutionnaire » ? Réponse synthétique de Monnerot : par carence au sommet. Une crise de régime se caractérise par une « pluralité des conflits ». Tout échappe à l’autorité du pouvoir en place, le désordre devient endémique. La société entre en « effervescence ».

L’effervescence n’est pas la révolution. Elle en est une phase, un moment, avec un début et une fin (un refroidissement) quand le milieu « n’est plus combustible ». Quand l’effervescence retombe, ce ne sont plus les mêmes qui sont aux commandes (Robespierre a été remplacé par Napoléon, Trotski par Staline, Balbo par Mussolini).

Situation révolutionnaire et effervescence font intervenir les « masses ». Ce sont des coagulations momentanées, les troupes des révolutions. Pour diriger les masses, leur donner un système nerveux, les jacobins, puis Lénine (en beaucoup plus efficace) ont conçu l’instrument du parti.

Ce que les léninistes appelaient « la radicalisation des masses », est une tendance à la politisation de catégories jusque-là conformistes et peu enclines à se passionner pour la chose publique (elles demandent surtout à l’État de faire son métier d’État). On entre alors dans une phase d’effervescence, « la société est parcourue en tous sens de réactions affectives intenses, comme les grains de limaille de fer par un courant magnétique ».

Les situations de détresse font apparaître sur le devant de la scène des élites violentes : les « hétérogènes subversifs », des irréguliers et marginaux que les barrières habituelles n’arrêtent pas. Ils contribuent à donner au mouvement sa force de rupture.

Dans une situation révolutionnaire, la carence et le besoin douloureux du pouvoir, peuvent jeter sur la voie de la révolution des éléments sociaux qui n’aspirent qu’à l’ordre. « Une heure vient où les Arditi, les jeunes lansquenets du Baltikum, les réprouvés qui le sont de moins en moins, n’apparaissent plus inquiétants, mais rassurants à la partie la plus homogène de la population. Ils semblent incarner à travers le malheur les valeurs de courage, de bravoure et de caractère sans quoi il n’est pas de grand pays… Même ceux qui ne sont pas leurs partisans pensent qu’il faut laisser faire l’expérience. » C’est un bon résumé des situations historiques d’exception. Mais, comme le précise Monnerot, la « situation historique » est celle que l’on ne revoit jamais deux fois.

Dans la France de 2013, sommes-nous entrés dans une « situation historique » ? Pas encore, bien entendu. Mais des signes attestent que l’on peut se diriger vers une telle situation imprévue. Ira-t-elle jusqu’au bout de ses promesses ? Il est trop tôt pour se prononcer. Mais rien n’est impossible. »

Dominique Venner

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Dans le dernier numéro de l’excellente revue Keltia, François Pinsard nous livre un beau portrait d’un personnage d’exception : le vrai Zorro !

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« Le secret du fringant épéiste hispanique est qu’il était en réalité un gentilhomme irlandais de noble naissance du nom de William Lamport, né en 1615 dans le comté de Wexford.

William quitte l’Irlande à cause de l’oppressive domination anglaise de son pays. A l’âge de 13 ans, il est déjà arrêté pour avoir publié des pamphlets séditieux. A la suite d’une mystérieuse évasion, il est capturé par des pirates et combat pour les Français au siège de La Rochelle en 1628 puis participe aux attaques contre des bateaux marchands anglais de Cromwell. Il s’enrôle ensuite dans l’un des trois régiments irlandais au service des Espagnols (O’Neill, O’Donnell et Fitzgerald) pour lutter ensuite contre les forces françaises en Flandre espagnole. Il est félicité pour son courage et entre au service du royaume d’Espagne. A l’âge de 25 ans, il est le protégé du comte-duc de Olivares. Ayant traversé presque toute l’Europe, il se vante de connaître 14 langues. Il pouvait décliner à la fois les compétences de pamphlétaire, d’ingénieur et de tacticien militaire. Assumant désormais le nom de Guillem Lombardo, il est envoyé dans la colonie espagnole du Mexique, en tant qu’espion au sujet d’une scandaleuse affaire concernant un gentilhomme de la cour d’Espagne. Il se fiance avec Antonia Turcious, une femme de la noblesse, mais avant qu’il se marie, il est arrêté en 1642 par l’Inquisition et accusé de complot envers l’Espagne et sa Majesté Très Catholique. Il est mentionné, dans les rapports, qu’il voulait introduire des réformes agraires, abolir l’esclavage des Indiens (dont il s’éprend avec sensibilité) et établir un État mexicain indépendant. Son nom apparaît aussi à maintes reprises dans les rapports des inquisiteurs, pour une série d’affaires torrides avec de nobles dames espagnoles, mariées et célibataires. La nuit de Noël 1650, il s’évade de manière si particulière qu’on le dit aidé par les démons. Il écrit des pamphlets, la nuit, et laisse des graffitis sur les murs de la ville. Cela contribue à créer sa légende et il inspire nombre de romanciers mexicains, jouant une part importante dans la création du personnage de Zorro en 1919 par Johnston McCully. Arrêté à nouveau en 1652, dans le lit de la femme du vice-roi du Mexique, le marquis Lope Diez de Caderyta, il est condamné à une peine de 7 ans d’emprisonnement, au terme de laquelle il doit être brûlé sur le bûcher de l’Inquisition en qualité d’hérétique. En 1659, il est attaché sur le bûcher de la ville de Mexico, mais au moment où les fagots de bois sont allumés, il se défait de ses liens et se suicide avant que les flammes ne l’atteignent.

Il a écrit la première déclaration d’indépendance du Mexique. Il passe pour un précurseur de l’indépendance mexicaine et sa statue trône dans le vestibule du monument qu’est la Colonne de l’Indépendance de la Ville de Mexico.  »

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« – Si on chantait ? Dit le colonel.
Il avait enlevé son masque et respirait l’air frais, par la portière, avec les mimiques réjouies d’un gastronome comblé. Le camion grimpait allègrement, dans les vignes, la petite départementale sinueuse. A chaque tournant, le Village brun, là-haut, se rapprochait.
– Mon Dieu ! Que cela sent bon ! Reprit-il. On ‘est de nouveau chez nous. Il ne s’est rien passé. Alors ! Qu’est-ce qu’on chante ?
– La Marseillaise, peut-être…, proposa comiquement le secrétaire d’État.
A l’intérieur du camion, l’armée fut prise de toux violente, gloussements et hoquets divers. Entre hussards et commandos de marine, un concours à qui rirait le plus fort. Qu’on ne croie pas qu’ils se forçaient, non. Pas d’affectation amère. Une franche rigolade, simplement. Délivrés de tout, ils se marraient.
– Ce que j’en disais, fit le ministre, c’était plutôt pour tâter le moral du peuple…
Ils se regardèrent tous deux et rirent encore une fois de bon cœur.
– Bon ! Marseillaise, aux accessoires ! conclut Dragasès. Capitaine, qu’est-ce que vous proposez de mieux ?
– Le Boudin, dit l’officier de commando. C’est con comme tout, mais ça parle. Et au moins tout le monde connaît les paroles.
– Le boudin, apprécia le colonel, le boudin… Nous sommes la plus étrangère des légions étrangères, étrangère à tout. Alors le boudin, en effet… Mais je me demande si ce serait tellement de circonstance ? Le boudin, ça se mérite et quant à faire Camerone, aujourd’hui, on ne peut pas dire que c’était réussi ! Peut-être demain, là-haut… Je crois que je tiens une meilleure idée.
S’assurant d’un œil malicieux que tout le monde écoutait, il s’éclaircit la voix comme un chanteur de dessert, prit son souffle et entonna :
Non, rien de rien
Non, je ne regrette rien
Ni le bien qu’on m’a fait
Ni le mal, tout ça m’est bien égal
Non, rien de rien
Non, je ne regrette rien
Tralala, tralala,
Aujourd’hui, je me fous du passé !
– Qu’en pensez-vous dit-il en terminant. Pas mal, non ? C’est un vieux truc. Je ne me souviens plus très bien des paroles, mais le principal y est. Vous ne connaissiez pas ? (…)
A gueuler comme des perdus, les veines du front à éclater, le cou gonflé, le visage écarlate, ils firent plus de bruit qu’une armée catholique victorieuse, chantant le Te Deum sous la nef d’une cathédrale. Dans les tournants, le camion vacillait, puis titubait sur les lignes droites, ses doubles roues mordaient joyeusement les talus. Joignant le geste à la parole, le hussard chauffeur lâchait le volant en cadence et jouait des mains et des bras comme un cabot qui sort ses tripes dans un mauvais tour de chant. L’officier de commando martelait le tableau de bord avec ses poings. Au « rien de rien », tout le plancher du camion vibrait sous les crosses des fusils. Si l’on peut analyser les sentiments profonds de ces braillards, on y trouve d’abord l’ivresse du clan. La tribu, au complet, célèbre son unité. Si peu nombreuse qu’elle se compte, elle emmerde le reste du monde. Mais on y décèle également quelque chose comme de l’angoisse. »

Jean Raspail. Le Camp des saints. Robert Laffont

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Cet extrait est l’illustration parfaite de ce que j’ai tant apprécié dans le Camp des Saints. Cette élégance, cette légèreté, cette gaieté dans l’humour omniprésent, qualité indispensable au Sudiste comme l’écrivait Maurice Bardèche, malgré les circonstances épouvantables, à l’heure du désespoir et dans les moments les plus dramatiques. Il vient donc en parfait complément du texte de Bardèche, tout en confirmant l’intuition de Raspail : « la Gauche (…) n’est que dérision haineuse (…) quand elle crache sur le drapeau, pisse sur la flamme du souvenir (…) elle le fait d’une façon épouvantablement sérieuse (…) La vraie Droite n’est pas sérieuse. C’est pourquoi la Gauche la hait, un peu comme un bourreau haïrait un supplicié qui rit et se moque avant de mourir. La Gauche est un incendie qui dévore et consume sombrement (…). La Droite est une flamme instable qui danse gaiement, feu follet dans la ténébreuse forêt calcinée. »

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