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il y a un peu moins de trois ans, au lendemain de « la tuerie de Toulouse », Dominique Venner répondait dans un entretien :
Question à Dominique Venner par Pauline Lecomte : Pour reprendre le thème de votre nouveau livre, L’Imprévu dans l’Histoire. Treize meurtres exemplaires (Editions Pierre-Guillaume de Roux), la tuerie de Toulouse entre-t-elle dans ce type d’imprévus ?
Dominique Venner : Oui, c’est un imprévu. Sans préjuger de toutes ses conséquences, c’est un événement qui laissera des traces. On pensait que le terrorisme islamiste était en voie d’extinction. Et l’on découvre qu’avec l’immigration, la France a couvé un nid de terrorisme pouvant frapper à tout instant et de façon imprévisible.
Question : Y aura-t-il un avant et un après Mohammed Merah ?
DV : Je viens de lire les propos de Claude Klein, professeur à l’Université hébraïque de Jérusalem (rapportés par Adrien Jaulmes dans Le Figaro du 26 mars 2012, page 2) : « L’affaire, dit M. Klein, met au jour des réalités sociologiques inéluctables : la France, qui abrite la troisième plus grande communauté juive du monde, après Israël et les Etats-Unis, avec quelques 600 000 Juifs, est aussi le pays qui compte la plus importante minorité arabe musulmane. Et c’est dans cette communauté que se développe le phénomène de l’islamisme radical. » Autrement dit, le drame de Toulouse révèle une réalité occultée par la bienséance officielle : la France est divisée en communautés ethniques différentes, parfois hostiles. Des réflexes communautaires antagonistes se révèlent face à un événement qui les touche particulièrement. Sans doute le savait-on. Mais voici que le drame de Toulouse en souligne la réalité.
Question : Plusieurs articles de presse ont été consacrés à votre livre L’Imprévu dans l’Histoire. Je vais en citer un, lu dans Valeurs Actuelles, sous la signature de Frédéric Valloire : « Dans son essai précédent, écrit ce chroniqueur, Le Choc de l’Histoire (Via Romana), Dominique Venner avait présenté sa philosophie de l’Histoire. En voici l’expérimentation : à travers treize meurtres politiques du XXe siècle surgit l’inattendu. Celui-ci bouscule tout sens de l’Histoire, emporte un ordre établi, ou au contraire le consolide, élimine un concurrent, avertit d’une intention, dévoile un adversaire, révèle une fragilité… » N’est-ce pas à tout cela que fait penser le drame de Toulouse ?
DV : C’est un événement sanglant dont nous ignorons la portée. Il me semble révélateur de réalités que l’on s’efforce de masquer, celles de l’énorme immigration extra-européenne et, comme je l’ai dit, de réflexes ethniques et communautaires perturbateurs. Nous ne sommes qu’au début d’un processus conflictuel qui rendra consciente les permanences identitaires.
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20 novembre 1936. Au début de la guerre civile, alors que l’avance nationaliste est bloquée à la hauteur de la cité universitaire de Madrid, à Alicante, José Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange espagnole, est fusillé par le Front populaire, au pouvoir depuis le 16 février.
« Vraiment, vous voulez que je meure ? Qui vous a dit que j’étais votre adversaire ? Celui qui vous l’a dit n’a aucune raison de l’affirmer. Mon rêve était la patrie, le pain et la justice pour tous les Espagnols et particulièrement pour ceux qui sont sacrifiés. Quand on est sur le point de mourir, on ne peut pas mentir. Je vous le répète avant que l’on me tue : je n’ai jamais été votre ennemi. »
Fils du général Miguel Primo de Rivera, cet avocat était l’artisan de la doctrine nationale-syndicaliste. Manuel Hédilla, son successeur, sera condamné à mort puis gracié par Franco.
Ironie de l’Histoire, ce même jour, le 20 novembre 1936 à Madrid meurt Buenaventura Durruti, figure importante de l’anarchisme espagnol, probablement assassiné par les communistes staliniens …
20 novembre 1959. Vingt trois ans plus tard, jusqu’au 29 : transfert du corps de José Antonio Primo de Rivera, d’Alicante à l’Escorial, porté à dos d’hommes jusque dans la vallée de Los Caïdos, à côté de Madrid. Adolf Hitler a envoyé une délégation de la SS, faisant s’incliner devant le cercueil les étendards à croix gammée, suivis par les fanions de la plupart des mouvements fascistes d’Europe.
Second clin d’œil de l’Histoire, c’est encore un 20 novembre, en 1975, que meurt le chef de l’État espagnol, Francisco Franco . Il est enterré dans la Vallée de Los Caïdos, aux côtés du créateur de la Phalange qu’il aura, après la mort de ce dernier, instrumentaliser à son profit : « Officiellement le programme de la Phalange sera le programme du régime franquiste. Mais un programme n’est pas une idéologie, et celle ci sera fournie par l’Église et les groupes d’action catholique tandis que la Phalange sera implicitement tenue pour suspecte, « sa proximité fasciste, quoi qu’elle s’en défende, suggérant d’inquiétants remugles de paganisme » (Dominique Venner, Le Siècle de 1914.)
(Source principale : Ephémérides Nationalistes)
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Le Chevalier, la Mort et le Diable… Admirable estampe gravée par Dürer en 1513, voici donc exactement cinq cents ans. L’artiste génial, qui exécuta par ailleurs sur commande tant d’œuvres édifiantes, fait preuve ici d’une liberté confondante et audacieusement provocatrice…
En ce temps-là, il ne faisait pas bon ironiser sur la Mort et le Diable, terreur des braves gens et des autres, entretenue par ceux qui en tiraient profit. Mais lui, le solitaire Chevalier de Dürer, ironique sourire aux lèvres, il continue de chevaucher, indifférent et calme.
Au personnage du Diable, il n’accorde pas un regard. Pourtant, cet épouvantail est réputé redoutable. Terreur de l’époque, comme le rappellent tant de Danses macabres et de rachats d’Indulgences pour les siècles de purgatoire, le Diable est en embuscade. Il se saisit des trépassés pour les jeter dans les brasiers de l’Enfer. Le Chevalier s’en moque et dédaigne ce spectre que Dürer a voulu ridicule.
La Mort, elle, le Chevalier la connaît. Il sait bien qu’elle est au bout du chemin. Et alors ? Que peut-elle sur lui, malgré son sablier brandit pour rappeler l’écoulement inexorable de la vie ?
Éternisé par l’estampe, le Chevalier vivra à tout jamais dans notre imaginaire au-delà du temps. Solitaire, au pas ferme de son destrier, l’épée au côté, le plus célèbre insoumis de l’art occidental chevauche parmi les bois sauvages et nos pensées vers son destin, sans peur ni imploration. Incarnation d’une figure éternelle en cette partie du monde appelée Europe[1].
L’image du stoïque chevalier m’a souvent accompagné dans mes révoltes. Il est vrai que je suis un cœur rebelle et que je n’ai pas cessé de m’insurger contre la laideur envahissante, contre la bassesse promue en vertu et contre les mensonges élevés au rang de vérités. Je n’ai pas cessé de m’insurger contre ceux qui, sous nos yeux, ont voulu la mort de l’Europe, notre civilisation millénaire, sans laquelle je ne serais rien.
(Dominique Venner)
Notes
- Un insoumis du XXe siècle, l’écrivain Jean Cau, lui a consacré l’un de ses plus beaux essais, Le Chevalier, la Mort et le Diable, publié aux Éditions de la Table Ronde en 1977. Face à la Mort, il imagine ces mots dans la bouche du Chevalier : « J’ai été rêvé et tu ne peux rien contre le rêve des hommes ».
Un Samouraï d’Occident
Essai de Dominique Venner
LE BREVIAIRE DES INSOUMIS
« Nous avons le confort, le savoir, l’opulence. Mais nos villes ne sont plus des villes et nos anciennes patries ne sont plus ce qu’elles étaient. L’excitation des caprices les plus fous fait imploser notre civilité. L’argent est devenu l’étalon exclusif de toute valeur. Sous les apparences de la démocratie, nous ne sommes pas libres.
Les causes remontent loin. Mais l’histoire n’est jamais immobile. Le moment est venu pour les Français et les Européens de se réveiller et de se libérer. Comment ? Certainement pas en replâtrant ce qui nous a conduits où nous sommes. À défaut de posséder une religion à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une riche mémoire occultée, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance.
Devant le vide sous nos pieds, la voracité démente du système financier, les menaces d’un conflit de civilisation sur notre sol, ce “Bréviaire” propose de réveiller notre mémoire et d’ouvrir des pistes neuves pour penser, vivre et agir autrement, permettre à chacun de se reconstruire dans la fidélité à des modèles supérieurs. »
Dominique Venner, 12 mai 2013
Ce livre-testament résonnera d’une force toute particulière et éclairera peut-être le geste ultime de Dominique Venner. À l’heure où il n’est plus en mesure de nous répondre.
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Avant de se donner la mort, hier, mardi 21 mai à 16 heures, devant l’autel de la cathédrale de Notre-Dame de Paris, l’écrivain et historien Dominique Venner a fait parvenir une lettre d’explication à ses amis.
La dernière lettre de Dominique Venner.
Je suis sain de corps et d’esprit, et suis comblé d’amour par ma femme et mes enfants. J’aime la vie et n’attend rien au-delà, sinon la perpétuation de ma race et de mon esprit. Pourtant, au soir de cette vie, devant des périls immenses pour ma patrie française et européenne, je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable. J’offre ce qui me reste de vie dans une intention de protestation et de fondation. Je choisis un lieu hautement symbolique, la cathédrale Notre-Dame de Paris que je respecte et admire, elle qui fut édifiée par le génie de mes aïeux sur des lieux de cultes plus anciens, rappelant nos origines immémoriales.
Alors que tant d’hommes se font les esclaves de leur vie, mon geste incarne une éthique de la volonté. Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m’insurge contre la fatalité. Je m’insurge contre les poisons de l’âme et contre les désirs individuels envahissants qui détruisent nos ancrages identitaires et notamment la famille, socle intime de notre civilisation multimillénaire. Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge aussi contre le crime visant au remplacement de nos populations.
Le discours dominant ne pouvant sortir de ses ambiguïtés toxiques, il appartient aux Européens d’en tirer les conséquences. À défaut de posséder une religion identitaire à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une mémoire propre, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance en rupture avec la métaphysique de l’illimité, source néfaste de toutes les dérives modernes.
Je demande pardon par avance à tous ceux que ma mort fera souffrir, et d’abord à ma femme, à mes enfants et petits-enfants, ainsi qu’à mes amis et fidèles. Mais, une fois estompé le choc de la douleur, je ne doute pas que les uns et les autres comprendront le sens de mon geste et transcenderont leur peine en fierté. Je souhaite que ceux-là se concertent pour durer. Ils trouveront dans mes écrits récents la préfiguration et l’explication de mon geste. »
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Dominique Venner sera à jamais présent à nos côtés .
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Pourquoi les manifestations françaises contre le mariage gay sont-elles aussi importantes et jamais lassées ? Pourquoi sont-elles un phénomène unique en Europe ? Les réponses sont plus complexes que ne le disent les politologues qui manquent de culture historique. Il faut en effet se souvenir que la France a toujours connu une vie politique et intellectuelle particulièrement conflictuelle.
C’est la France qui inventa 1789, la Révolution et la Contre-Révolution, la droite et la gauche, la Terreur et la révolte populaire de la Vendée. C’est elle qui inventa au XIXe siècle le bonapartisme, les différentes sortes de royalisme et de républicanisme, puis, au XXe siècle, le fascisme et l’antifascisme. C’est elle qui inventa, après 1940 le pétainisme et le gaullisme (François Mitterrand était un ancien pétainiste). On ne peut ignorer que cette période s’est conclue par une atroce guerre civile (1943-1944) et une sanglante épuration.
C’est encore la France qui inventa, à la fin de la guerre d’Algérie (1962), une révolte militaire sans précédent opposant gaullistes et antigaullistes (souvent ex-gaullistes) : plusieurs généraux emprisonnés, ainsi que de très nombreux officiers et quantité de civils. Cette même période (1962) a laissé des traces profondes dans les jeunes générations issues des Européens d’Algérie (Pieds Noirs). Par la suite, c’est encore en France que l’on a vu naître, avec le Front national, le premier grand mouvement « populiste » européen contre l’immigration afro-maghrébine voulue par les mondialistes.
Il faut conserver à l’esprit cette longue histoire conflictuelle pour interpréter le « printemps français ». Il faut encore se souvenir que la France est le dernier pays au monde (avec la Corée du Nord) où subsiste un parti communiste contrôlant une organisation syndicale puissante fonctionnant comme une mafia usant de violences. Ce parti communiste est l’allié électoral du parti socialiste au pouvoir. Il faut se souvenir aussi que beaucoup de cadres de l’actuel parti socialiste sont d’anciens trotskistes qui disposent d’une influence considérable dans l’Éducation nationale, la Justice et les médias. Cela signifie qu’à la différence de l’Allemagne par exemple, subsiste toujours en France un potentiel de guerre civile qui n’attend qu’une occasion pour s’éveiller.
Et, justement, à la suite des provocations méprisantes du président Hollande et de son gouvernement, cette affaire du mariage gay est devenue une occasion d’affrontements pacifiques qui a jeté dans les rues des centaines de milliers d’opposants, et notamment de jeunes mères avec leurs enfants. Au début, l’Église catholique a joué son rôle dans cette mobilisation, puis elle s’est officiellement retirée. On peut noter au passage que l’Espagne, pays où l’Église est plus forte qu’en France, le mariage gay a été adopté sans susciter une telle opposition.
À l’origine, on pensait que le projet socialiste de loi sur le mariage gay était l’un de ces attrape-nigauds par lesquels les politiciens amusent la galerie. Et puis on a compris que derrière l’attrape-nigauds s’était glissé l’un de ces projets pervers par lesquels les fanatiques de la déconstruction et de la mondialisation veulent détruire les dernières charpentes qui structurent les société européennes. Il faut rappeler que le mariage n’est pas qu’une question d’amour. Ce n’est pas un simple contrat, c’est une institution en vue des enfants à venir. Il garanti à l’enfant son identité représentée par un vrai père et une vraie mère. C’est ce qu’a voulu annuler la loi Taubira qui remplace le droit des enfants par le droit accordé à des adultes gay de s’offrir des enfants selon les critères de la société de consommation.
Pour toutes ces raisons, le projet de mariage gay a été ressenti comme une atteinte insupportable à l’un des fondements sacrés de notre civilisation. D’où les immenses manifestions populaires des 13 janvier et 24 mars à Paris, puis du 5 mai un peu partout, en attendant celles du 26 mai.
Les manifestants souvent très jeunes ne sont pas homogènes. Pour une part ce sont des bourgeois catho non-violents, issus des JMJ, séduits par le nouveau discours tolérant de l’Église en matière d’amour conjugal. Leurs références sont Gandhi et Martin Luther King… Mais, pour une autre part, ce sont de jeunes identitaires mobilisés par le dynamisme insolent des manifestations. L’avenir dira laquelle des composantes l’emportera sur l’autre par sa vitalité et sa détermination.
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Dominique Venner, que nous sommes nombreux à considérer comme un maître, notamment dans sa manière d’appréhender l’Histoire, est né le 16 avril 1935 à Paris. C’est donc son anniversaire.
« C’est un sujet passionnant, très actuel et mal connu que la naissance des révolutions. Il avait été étudié par le sociologue Jules Monnerot (1908-1995) après les événements français de Mai 68 dans son livre Sociologie de la Révolution (Fayard, 1969). Travail précieux pour lequel son auteur a forgé une série de concepts applicables à toutes les situations.
S’agissant d’une étude sociologique et non d’une histoire des idées, Monnerot use d’une seule appellation, sans ignorer bien entendu tout ce qui sépare et oppose les différentes révolutions du XXe siècle, bolchevisme, fascisme italien, national-socialisme allemand, révolution de 1944, ou celle de 1968. Il estime en effet que ces phénomènes de foule relèvent de la même analyse sociologique, tout en faisant une nette différence entre révolutions de type conservatrice et révolutions déconstructrices.
Mais d’abord, Monnerot définit quelques concepts applicables à toute révolution. En premier lieu la « situation historique ». Elle est celle que l’on ne reverra jamais deux fois. C’est vrai pour 1789, 1917, 1922, 1933 ou 1968. Autre notion complémentaire : la « situation de détresse ». Elle se caractérise par des troubles non maîtrisés. La structure sociale se défait : les éléments ne sont plus à leur place.
Quand une société est stable, on y distingue des éléments sociaux normaux (« homogènes ») et des marginaux (« hétérogènes »). Les éléments marginaux sont en marge parce qu’ils y sont maintenus par la pression des éléments « homogènes ». Lorsqu’un seuil critique de bouleversement est atteint, la partie homogène commence à se dissocier. On observe alors comme une contagion de chaos.
Remarque intéressante qui s’applique aux révolutions conservatrices : « l’homogène, même en voie de dissociation, reste l’homogène ». Quand le bouleversement est radical, « du fond même de la société monte une demande de pouvoir ». Le fascisme, en 1922 ou 1933, fut par exemple une réponse à cette demande dans une société ayant un haut développement (industrie, sciences, culture). Dans une telle société, quand l’ordre s’est effondré, les éléments conservateurs (homogènes) deviennent provisoirement révolutionnaires par aspiration à l’ordre et demande de pouvoir.
Comment aboutit-on à une « situation révolutionnaire » ? Réponse synthétique de Monnerot : par carence au sommet. Une crise de régime se caractérise par une « pluralité des conflits ». Tout échappe à l’autorité du pouvoir en place, le désordre devient endémique. La société entre en « effervescence ».
L’effervescence n’est pas la révolution. Elle en est une phase, un moment, avec un début et une fin (un refroidissement) quand le milieu « n’est plus combustible ». Quand l’effervescence retombe, ce ne sont plus les mêmes qui sont aux commandes (Robespierre a été remplacé par Napoléon, Trotski par Staline, Balbo par Mussolini).
Situation révolutionnaire et effervescence font intervenir les « masses ». Ce sont des coagulations momentanées, les troupes des révolutions. Pour diriger les masses, leur donner un système nerveux, les jacobins, puis Lénine (en beaucoup plus efficace) ont conçu l’instrument du parti.
Ce que les léninistes appelaient « la radicalisation des masses », est une tendance à la politisation de catégories jusque-là conformistes et peu enclines à se passionner pour la chose publique (elles demandent surtout à l’État de faire son métier d’État). On entre alors dans une phase d’effervescence, « la société est parcourue en tous sens de réactions affectives intenses, comme les grains de limaille de fer par un courant magnétique ».
Les situations de détresse font apparaître sur le devant de la scène des élites violentes : les « hétérogènes subversifs », des irréguliers et marginaux que les barrières habituelles n’arrêtent pas. Ils contribuent à donner au mouvement sa force de rupture.
Dans une situation révolutionnaire, la carence et le besoin douloureux du pouvoir, peuvent jeter sur la voie de la révolution des éléments sociaux qui n’aspirent qu’à l’ordre. « Une heure vient où les Arditi, les jeunes lansquenets du Baltikum, les réprouvés qui le sont de moins en moins, n’apparaissent plus inquiétants, mais rassurants à la partie la plus homogène de la population. Ils semblent incarner à travers le malheur les valeurs de courage, de bravoure et de caractère sans quoi il n’est pas de grand pays… Même ceux qui ne sont pas leurs partisans pensent qu’il faut laisser faire l’expérience. » C’est un bon résumé des situations historiques d’exception. Mais, comme le précise Monnerot, la « situation historique » est celle que l’on ne revoit jamais deux fois.
Dans la France de 2013, sommes-nous entrés dans une « situation historique » ? Pas encore, bien entendu. Mais des signes attestent que l’on peut se diriger vers une telle situation imprévue. Ira-t-elle jusqu’au bout de ses promesses ? Il est trop tôt pour se prononcer. Mais rien n’est impossible. »
Dominique Venner
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« Pas un instant je n’oublie les luttes du moment. Pas un instant je n’oublie les luttes du passé qui nous ont fait ce que nous sommes. Pas un instant je n’oublie qu’exister c’est se vouer et se dévouer, mais aussi lutter. Je n’oublie pas non plus que la vie est faite de moments intenses et de moments calmes, de joies et de cruautés. La vie (et notre vie) est à l’image de la nature dont elle procède, ce que disait déjà Héraclite dans un aphorisme très actuel, près d’un trentaine de siècles avant nous : « La nature aime les contraires : c’est avec elle qu’elle produit l’harmonie ». Ce que disait aussi Homère de façon différente et poétique en soulignant que notre existence s’inscrit dans les grands cycles naturels : « Comme naissent le feuilles, ainsi font les hommes. Les feuilles, tour à tour c’est le vent qui les épand sur le sol et la forêt verdoyante qui les fait naître quand se lèvent les jours du printemps. Ainsi des hommes : une génération naît à l’instant où une autre s’efface » (Iliade, VI, 146).
Pour nos contemporains, toujours plus nombreux, dont les jours s’écoulent dans l’univers artificiel des villes (qui ne sont plus toujours des villes), il est souvent difficile de percevoir, au-delà du béton, du verre, de l’acier et de la luminosité électrique, que la nature, en dépit de son absence visible, continue de nous englober et de dessiner les lignes de force de notre existence, entre l’enfantement et l’effacement : « comme les feuilles… »
La nature oubliée, pourtant, se rappelle à nous, parfois, de la façon la plus insolite et inévitable quand tombe la pluie que la ville et le génie des hommes ne peuvent maîtriser. C’est une réflexion que suggère un petit livre profond au titre provocateur : Aimer la pluie, aimer la vie (Éditions J’Ai Lu). Son auteur, l’écrivain et philosophe Dominique Loreau, est une femme. Elle vit au Japon, ce qui contribue sans doute à sa perception immanentiste de l’existence. Je livre les première lignes de son essai qui dit l’essentiel à mes yeux : « Dans ce monde extrêmement rationnel, où les sociétés modernes imposent leurs lois à la nature et à l’homme, il est un phénomène que nul ne pourra jamais contrôler : la pluie ». C’est une pensée neuve à longue portée. Elle nous fait prendre conscience, qu’en dépit des apparences, la nature, notre mère à tous, continue de rythmer notre existence malgré l’artificialité de la ville. Merci donc à la pluie de nous rappeler cette évidence rassurante. Elle me semble désormais beaucoup plus amicale, même quand elle se fait parfois un peu trop insistante dans les régions du septentrion européen. »
Dominique Venner
« Que l’européanité soit une réalité, cela se manifeste déjà au niveau primaire des sensations. Au contact de l’altérité se perçoit l’identité.
Mais l’européanité est attestée aussi par l’histoire et le caractère transnational des grands faits de culture. Au-delà d’un art rupestre spécifique à toute l’Europe voici déjà 30 000 ans, au-delà des pierres levées et des grands poèmes fondateurs, ceux des Hellènes, des Germains ou des Celtes, il n’y a pas une seule grande création collective qui, ayant été vécue par l’un des peuples de l’ancien ‘espace carolingien, n’a pas été vécue également par tous les autres. Tout grand mouvement né dans un pays d’Europe a trouvé aussitôt son équivalent chez les peuples frères et nulle part ailleurs. A cela on mesure une communauté de culture et de tradition que ne peuvent démentir les conflits inter-étatiques. Les poèmes épiques, la chevalerie, l’amour courtois, les libertés féodales, les croisades, l’émergence des villes, la révolution gothique, la Renaissance, la réforme et son contraire, l’expansion au-delà des mers, la naissance des États -nations, le baroque profane et religieux, la polyphonie musicale, les Lumières, le romantisme, l’univers faustien de la technique ou l’éveil des nationalités… En dépit d’une histoire souvent différente, les Slaves de Russie et des Balkans participent aussi de cette européanité. Oui, tous ces grands faits de culture sont communs aux Européens et à eux seuls, jalonnant la trame d’une civilisation aujourd’hui détruite. »
Dominique Venner. Histoire et tradition des Européens. Du Rocher.
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