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fourmis« Le monde dans lequel nous vivons n’est pas une illusion. Il existe bel et bien, tous ceux qui souffrent dans leur chair le savent. Mais l’esprit peut prendre son envol pour d’autres couches de réalité, qui ne sont pas illusoires non plus. C’est une évidence de bon sens : plus on s’élève, plus la vue embrasse de choses. Et plus on embrasse de choses, mieux on perçoit les liens qui unissent ces choses et les abîmes qui les séparent. La fourmi besogneuse croit l’univers tout entier contenu dans le monticule de terre qui borne sa vue… mais l’homme qui voit la fourmilière, ses galeries, son organisation, saisit exactement quel est le rôle d’une fourmi dans l’étendue de la forêt. Il voit des centaines de fourmilières identiques, il voit les fourmis par milliers transbahuter des graines, les enfouir, les répartir sous le sol avec une étonnante intelligence. Il sait que de ces graines germeront de nouvelles pousses que la pluie fortifiera (…) L’homme qui voit tout ceci comprend que les fourmis redistribuent partout la vie des arbres, aèrent le sol, le débarrassent des détritus qui l’étouffent. Il comprend que la survie de la forêt dépend de la besogne de la moindre fourmi ; voilà pourquoi il remercie la nature de ses bienfaits, la nature qui lui prodigue tant d’astucieuses leçons. Pendant ce temps, la fourmi stupide gravit son monticule et transporte sa graine sans se poser de question, rejoignant dans sa tranquillité le sage qui la contemple. En effet, la cohérence des éléments ne parait claire et évidente qu’à deux types d’individus : les imbéciles, qui ne se posent jamais la moindre question, et les sages qui détiennent les réponses pour avoir eu un instant la vue haute. la plus grande partie de l’humanité se situe entre l’un et l’autre, ni fourmi stupide, ni sage, elle s’interroge et ne comprend rien, se débat, ne dort que d’un œil, ne sait plus vers quelle chimère se tourner, et prie finalement des simulacres de divinités pour ne pas mourir d’abandon. »

Cécile Guignard-Vanuxem. Vercingétorix. Le défi des Druides. Ed.Cheminements

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23 janvier -52. Date à laquelle on situe le massacre des Romains de Cenabum (Orléans) par les révoltés gaulois qui fut l’élément déclencheur de la Guerre des Gaules.

gaulois à Cenabum

« Anipa (…) prit la rue par laquelle elle avait vu partir le cortège des insurgés. C’était celle qui menait au quartier résidentiel où les riches commerçants romains s’étaient fait construire des maisons de pierre blanche. Quand elle y parvint la dévastation était achevée. Des familles de notabilités de l’import-export il ne restait plus que des corps sans vie. A l’appel de Cotuatos et de Conconnétodumnos, les émeutiers se regroupaient sur la place, devant la demeure de l’intendant Fufius Cita. Anipa avisa une échelle appuyée contre le pignon de la maison d’un charpentier et y grimpa pour dominer la scène. Elle était horrifiée mais sa curiosité était plus forte que son horreur.

Les portes de bronze du luxueux hôtel de l’intendant étaient closes. Une équipe de guerriers vint quérir un énorme madrier dans l’atelier du charpentier, et s’en servit comme bélier. Dès que les battants cédèrent , une horde hurlante se rua dans le bâtiment. Un moment s’écoula. L’homme de confiance de César devait s’être caché et bien caché. Enfin découvert, il apparut dans l’embrasure de ce qui avait été la porte, encadré de guerriers qui le tenaient par les bras et le poussaient de la pointe de leurs glaives. Il était vert de peur. Le grand druide s’avança vers lui.

Caius Fufius Cita, nous t’accusons d’avoir dépouillé notre peuple …….»

Yann Brekilien. La louve et le sanglier. Éditions du Rocher.

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Un tel sursaut (mais on cherche encore notre Vercingétorix) ne nous ferait pas de mal aujourd’hui puisque, si ce ne sont pas des Romains, nous ne manquons pas d’occupants ; et j’en vois beaucoup, sans aller chercher loin auxquels on pourrait  bien faire subir le même sort qu’à Fufius Cita…

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Dans leurs « Éphémérides nationalistes », Emmanuel Ratier et Patrick Parment donnent aujourd’hui comme date anniversaire du signal général de la révolte des Gaulois de Vercingétorix, en -52, contre les envahisseurs Romains, par le massacre de commerçants étrangers à Cenabum (Orléans).

« Elle entrebâilla la porte et vit arriver du bout de la rue une foule de guerriers agitant leurs armes en l’air en criant : « Mort aux Romains ! » A leur tête marchait d’un pas lent et calme le grand druide Cotuatos, revêtu comme pour une procession de sa tunique blanche brodée d’argent et son long manteau, mais tenant une lance à la main, et, un peu en retrait, l’épée nue, le grand chef des Carnutes, le colosse aux farouches moustaches rouges, Conconnétodumnos. On reconnaissait dans la troupe vociférante les guerriers de son clan, désignés par leurs tuniques ocre quadrillées de vert et de brun, ceux de Catuviros aux vêtements rayés de rouge et de bleu, ceux d’Uronertos, en damier jaune et noir, de Suvritus, de Vellaunos. Il y en avait d’autres qu’Anipa n’identifiait pas. Elle ouvrit la porte toute grande et invita le reste de la famille à la rejoindre sur le seuil.

– Mort aux Romains ! Leur cria un des hommes de Conconnétodumnos qui passait devant eux.

– Mort aux Romains ! Répondirent-ils d’une seule voix. »

Yann Brekilien, La louve et le sanglier. Éditions du Rocher.

… et si on remettait ça ? Bon, sans les Romains cette fois, mais on n’aurait aucun mal à trouver quelques envahisseurs, non ? … après tout, on peut rêver…

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« – Crois-tu, dit le Grec, que si vous aviez gagné cette guerre, vous auriez fondé un véritable État, comme Rome ?

Mais le druide s’esclaffe.

– Un État ? Comme Rome ? Quelle abomination ! Oh non, quelle épouvantable chose qu’un État ! Ce n’est pas du tout de cela que je te parle ! As-tu rencontré un seul Celte capable d’être un citoyen ? C’est bon pour les Grecs et les Romains, cette chose abstraite et grégaire, cette chose petite et sans couleur ! Un citoyen ! Cette outre pleine de vent et toute pareille aux autres ! Un Celte qui perdrait sa couleur et sa liberté perdrait la vie ! Un pouvoir, d’accord, tant que l’on, peut mettre à mort le roi qui s’en rend indigne ! Un Empire, d’accord, tant que l’on peut y dénombrer des tribus toutes différentes, avec pour chacune ses petits chefs ! Mais un État … une organisation étatique… quelle absurdité insupportable pour des hommes libres ! Quelle contrainte vide et déracinée ! Pourrions nous devenir comme les légionnaires de Rome, des fourmis toutes identiques, des fourmis serviles qui ne savent plus bien pour qui ni pourquoi elles meurent ? Sans tribu, sans roi, sans fief ? De qui est-on l’obligé quand on n’a plus de roi ? Peut-on vivre et mourir pour l’un de ces démagogues, l’un de ces fantoches en toge que l’opinion publique mène comme des marionnettes, et qui se gargarisent de leur civisme ? Et puis ce serait trahir les lois de la nature, la nature si imaginative qui a fait en sorte que personne ne marche au même pas… Donnerais-tu la même nourriture et la même loi à l’aigle, à l’ours, au loup, au cochon sauvage ? Donne à manger des glands au loup, il en mourra ! Oblige un aigle à courir dans les fourrés et ses ailes se briseront, ses serres deviendront des moignons, il ne sera plus un aigle ! L’État … Quel crime contre nature est-ce là ? Et quand on déciderait de commettre ce crime, sur quel animal ajusterait-on la conduite de tous les autres ?

Non, mon ami, le prodige dont je te parle, c’est l’aigle, l’ours, le loup, le cochon, la forêt entière s’armant contre l’intrus qui la mutile et qui la broie ! Un Cadurque et un Breton combattant côte à côte, voilà la merveille ! Voilà la vraie force conforme aux lois sacrées de la nature ! Mais par quelle logique absurde l’ours chercherait-il à être chien ? Mais par quelle logique absurde le Cadurque chercherait-il à être Breton ? L’union n’est pas l’uniformité ! Est-il nécessaire d’être tous identiques pour défendre la même cause, et, pour combattre ensemble, de manger le même foin aux mêmes heures ? »

Cécile Guignard-Vanuxem, Vercingétorix. Le défi des Druides. Éditions Cheminements.

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Lors du siège d’Alésia, « Devant l’absence des secours et n’ayant plus ni blé, ni aucune nouvelle de chez les Eduens, les assiégés convoquèrent une assemblée et délibérèrent sur la façon dont devait s’achever leur destin. Plusieurs avis furent exprimés, les uns voulant qu’on se rendit, les autres qu’on fit une sortie tandis qu’on en avait encore la force; mais je ne crois pas devoir passer sous silence le discours de Critognatos, à cause de sa cruauté singulière et sacrilège. Ce personnage, issu d’une grande famille arverne et jouissant d’un grand prestige, parla en ces termes :

« Je ne dirai rien de l’opinion de ceux qui parlent de reddition, mot dont ils voilent le plus honteux esclavage; j’estime que ceux là ne doivent pas être considérés comme des citoyens et ne méritent pas de faire partie du Conseil. Je ne veux avoir affaire qu’à ceux qui sont pour la sortie, dessein dans lequel il vous semble à tous reconnaitre le souvenir de l’antique vertu gauloise. Mais non, c’est lâcheté et non pas vertu, que de ne pouvoir supporter quelque temps la disette. Aller au devant de la mort, c’est d’un courage plus commun que de supporter la souffrance patiemment. Et pourtant, je me rangerais à cet avis -tant je respecte l’autorité de ceux qui la préconisent- s’il ne s’agissait que d’aventurer nos connaissances; mais en prenant une décision, nous devons tourner nos regards vers la Gaule entière que nous avons appelée à notre secours. De quel cœur pensez vous qu’ils combattront quand en un même lieu auront péri quatre-vingt mille hommes de leurs familles, de leur sang, et qu’ils seront forcés de livrer bataille presque sur leurs cadavres ? Ne frustrez pas de votre appui ces hommes qui ont fait le sacrifice de leur vie pour vous sauver, et n’allez pas, par manque de sens et de réflexion, ou par défaut de courage, courber la Gaule entière sous le joug d’une servitude éternelle. Est-ce que vous doutez de leur loyauté et de leur fidélité, parce qu’ils ne sont pas arrivés au jour dit ? Eh quoi ! pensez vous donc que ce soit pour leur plaisir que les Romains s’exercent chaque jour là-bas, dans les retranchements de la zone extérieure ? Si vous ne pouvez, tout accès vers nous leur étant fermé, apprendre par leurs messagers que l’arrivée des nôtres est proche, ayez-en pour témoins les Romains eux-mêmes : car c’est la terreur de cet évènement qui les fait travailler nuit et jour à leurs fortifications. Qu’est-ce donc que je conseille ? Faire ce que nos ancêtres ont fait dans la guerre qui n’était nullement comparable à celle ci, une guerre des Cimbres et des Teutons : obligés de s’enfermer dans leurs villes et pressés comme nous par la disette, ils ont fait servir à la prolongation de leurs existences ceux qui, trop âgés, étaient des bouches inutiles, et ils ne se sont point rendus. N’y eut-il pas ce précédent, je trouverais beau néanmoins que pour la liberté nous prenions l’initiative d’une telle conduite et en léguions l’exemple à nos descendants. Car en quoi cette guerre là ressemblait-elle à celle d’aujourd’hui ? Les Cimbres ont ravagé la Gaule et y ont déchainé un grand fléau : du moins un moment est venu où ils ont quitté notre sol pour aller dans d’autres contrées; ils nous ont laissé notre droit, nos lois, nos champs, notre indépendance. Mais les Romains, que cherchent-ils ? Que veulent-ils ? C’est l’envie qui les inspire : lorsqu’ils savent qu’une nation est glorieuse et ses armes puissantes, ils rêvent de s’installer dans ses campagnes et au cœur de ses cités, de lui imposer pour toujours le joug de l’esclavage. Jamais ils n’ont fait la guerre autrement. Si vous ignorez ce qui se passe pour les nations lointaines, regardez tout près de vous, cette partie de la Gaule qui, réduite en province, ayant reçu des lois, des institutions nouvelles, soumise aux haches des dictatures, ploie sous une servitude éternelle ».

(César, La Guerre des Gaules, VII, 77)

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« Malgré toutes ses discordes, la Gaule n’avait donc point perdu le goût de la liberté et le sentiment national. La pensée de devenir un seul empire végétait toujours dans les diverses cités. Le patriotisme celtique était, comme le panhellénisme, un sentiment léger et subtil, se dissipant sous le souffle d’un orage plus fort, se reformant aussi vite qu’il se dispersait. A tous les moments de crise, il se leva des hommes d’une ambition intelligente pour dire que, s’il fallait avoir des maîtres, mieux valait obéir à des Gaulois. »

Camille Jullian, Vercingétorix.

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Dans sa préface à sa Guerre des Boutons, Louis Pergaud abat les cartes d’entrée de jeu : « Foin des purs latins : je suis un Celte ». Et les enfants eux mêmes , en classe, retiennent sans problème « l’histoire des Gaulois qui étaient de grands batailleurs et qu’ils admiraient fort ».On nous décrit habituellement « la guerre des boutons » comme une chronique tendre de la France des années 60 où deux bandes de gamins, rivales, jouent à la guéguerre. C’est pas faux … mais est-ce qu’il ne serait pas possible d’aller un peu plus loin et d’y voir, aussi, une sorte de geste épique menée par des Gaulois d’aujourd’hui ?

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Les Velrans, qui sont des calotins, et les Longevernes, qui sont des rouges , entretiennent depuis des générations, et sans trop se rappeler pourquoi, un antagonisme permanent.

En fait, les gaulois ont toujours aimé se flanquer sur la gueule : c’est une véritable institution culturelle mais qui répond en même temps à des nécessités économiques. Les Gaulois qui pratiquent le commerce, et qui ont développé l’agriculture à force d’innovations techniques semblent pourtant leur préférer les vertus guerrières puisqu’ils se définissent eux-mêmes avant tout comme des guerriers. Cicéron, caricatural, affirme qu’ils «  trouvent honteux de se procurer du blé par le travail. Aussi vont-ils, les armes à la main, couper la moisson sur les champs d’autrui ».. Même l’artisanat, pour lequel ils sont réputés, se voit disputer son importance dans les bases de l’économie par le butin et le mercenariat et chaque expédition rapporte une masse considérable de richesse, même si une bonne partie est donnée en offrande pour les divinités.

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La guerre a été déclarée par des insultes, et ce sont encore les insultes qui président à la première confrontation , lancées par les chefs de chaque armée « revenant au mode antique ».

Les champions des armées gauloises (qui sont des troupes des pagi -c.a.d. approximativement des cantons- plutôt que des armées stricto sensu) se lancent des défis . Ils adressent les pires insultes à leurs adversaires et dressent la liste de leurs ancêtres en en vantant les exploits sur fond de cris de guerre, de sonneries de trompe et de martèlement des boucliers. Les Gaulois se livrent aussi à des danses guerrières pour impressionner l’ennemi et lui tirent ostensiblement la langue. Il est fort possible que Lebrac en montrant son cul à ses ennemis, ne fasse que retrouver un vieux geste déjà moult fois effectué par ses ancêtres, et inscrit dans ses gènes.

Pendant que les bardes font l’éloge des chefs.

Et que, parfois, les druides essaient de s’interposer pour proposer des solutions pacifiques.

Et quand rien n’a marché et que le combat général devient inéluctable, tout le monde se précipite à l’attaque.

Lebrac est le chef des Longeverne, l’Aztec des Gués celui des Velrans. Lebrac a un nom suffisamment parlant . Et on nous dit que l’Aztec doit son surnom à sa petite taille et à son apparence chétive, mais on sait que dans la littérature mythique irlandaise, le gué tient une place importante et qu’il est intimement lié aux héros. Cuchulainn notamment lors de la malédiction des Ulates à laquelle il est le seul à échapper, se positionne sur Ath Gabla (le Gué de la Fourche) de manière à repousser les troupes de la reine Medb (Razzia des Vaches de Cooley) …

Les Gaulois n’utilisaient pour désigner les personnes que des sortes de surnoms qui leur étaient attribués par la collectivité à la suite d’événements divers. C’est dire que ces désignations pouvaient changer au cours de la vie et qu’elles n’étaient pas héréditaires. Pour désigner des personnages influents, on avait ainsi tendance à utiliser des superlatifs flatteurs. L’exemple le plus significatif peut être et en tous cas le plus connu est celui de Vercingetorix :le roi des super-guerriers (Orgetorix « le roi des tueurs »,). On est ici gâté avec la profusion de surnoms et superlatifs : Migue la Lune, La Crique, Touegueule…

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Dès la première bataille, un prisonnier est fait par les Longevernes auquel on coupe tous les boutons de tous ses vêtements et la troupe rentre au bercail en chantant et brandissant les trophées. Pour les batailles suivantes, l’ennemi s’alignera sur cette mesure de rétorsion et les uns et les autres en arriveront à piquer carrément les vêtements des prisonniers.

A part la main droite que César fit couper à tous les rescapés gaulois d’Uxellodunum, dans l’Antiquité Celte, c’était plutôt la tête de celui qu’on venait de tuer qu’on coupait , et qu’on attachait à l’encolure du cheval : ce trophée était l’unique part de l’ennemi tué qui revenait à son vainqueur puisque ses armes et les restes de la dépouille étaient ramenés triomphalement et entreposés dans le sanctuaire en offrande aux dieux, mais le nombre qu’il en pouvait aligner témoignait de sa bravoure et lui donnait droit à une part du butin.

A l’issue du combat donc, les vainqueurs entamaient un chant de victoire, s’emparaient de tout ce qu’ils pouvaient sur le champ de bataille, dépouillaient les cadavres et prélevaient les têtes qu’ils ramenaient chez eux afin de les conserver.

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La bataille a lieu dans les bois et les belligérants se reconnaissent par des cris d’oiseaux, le tirouit de la perdrix grise…

La Gaule était réputée pour être recouverte de forêts (la Gaule chevelue), même si la surface qu’elles occupaient était sensiblement la même qu’aujourd’hui. Si les Gaulois s’y sentaient parfaitement à l’aise, les romains en revanche redoutaient la forêt. Il y a un texte où Lucain montre bien la terreur qu’elle pouvait leur inspirer (« … les rayons du soleil ne peuvent percer les épais feuillages et une obscurité glaciale règne en permanence dans cette forêt où, dit-on, chaque arbre a été arrosé par des flots de sang humain… »). On connait aussi le Kad Goddeu, ou Combat des Arbres, de Taliésin.

De même les oiseaux avaient une grande importance pour les Gaulois, ils étaient souvent divinisés. L’alouette (alauda) : avait donné son nom à une légion gauloise formée par César. Les chouans avait comme signe de ralliement le hululement de la chouette.

Ils décident de se battre nus mais vont rapidement y voir plus d’inconvénients que d’avantages. Décideront donc de garder leurs vêtements pour les affrontements mais décident aussi de constituer un trésor de guerre pour réparer les dommages (boutons, agrafes, bretelles, argent…)

On ne sait pas trop ce qu’il en est de cette histoire du combat nu : légende ou réalité ?… C’est peut être arrivé mais ça devait être tributaire de l’époque, des circonstances, etc… S’ils combattaient nus, c’était pour narguer les adversaires mais cette attitude devait surtout relever d’une raison religieuse : les guerriers offraient ainsi leur vie à leur tribu et aux dieux qui étaient censés les regarder combattre.Pourtant, ce n’est quand même pas très pratique et ça peut être douloureux (difficile de combattre efficacement avec une épine dans le pied) : ils portaient un casque, se protégeaient d’un bouclier, et dès le IIIe siècle avant notre ère ils avaient inventé la cote de maille. Avec naturellement de grandes disparités entre d’une part les princes, nobles et guerriers fortunés, et d’autre part les troupes à pied.

Comme pour toute armée en mouvement les gaulois établissaient de la même manière des bivouacs où il s’agissait de préparer la nourriture, réparer le matériel endommagé, panser d’éventuelles blessures.

Ils suivent une stratégie militaire et tendent des pièges subtils

On est habitué à entendre dire que les Gaulois étaient tout sauf disciplinés. On s’imaginerait donc, dans les batailles, une meute de brutes se précipitant vers l’ennemi, sans méthode et tout le monde en train de se taper dessus dans une mêlée indescriptible. Et pourtant les troupes gauloises ont une connaissance parfaite de manœuvres difficiles, telles que le combat de cavalerie, la phalange, et la tortue et César laisse deviner une image des Gaulois qui utilisent des tactiques militaires classiques. et se plient à une authentique stratégie, parfois calculée à long terme.

gaulois x

Le trésor de guerre est constitué et sera entreposé dans une cabane construite au fond des bois, avec une « fougue joyeuse » et un « frénétique enthousiasme » surpassant ceux des Celtes, jadis « narguant le tonnerre à coups de flèches ». C’est Marie, la « femme » du chef, qui présidera aux réparations et aux pansements. Mais en attendant, tout le monde décide d’inaugurer la cabane par un festin somptueux.

On se retrouve là dans une « situation » de bivouac où les femmes attendent les guerriers à l’issue des combats (quand elles ne participent pas elles mêmes à ces combats). Mais il y a aussi le festin qui est également caractéristique du retour des batailles et il semble que la seule distraction que les textes accordent au peuple est « l’assemblée », de quelque nature que ce soit . Au plaisir matériel de la bonne chair et du repas proprement dit, s’ajoute le plaisir intellectuel du verbe où bavardages et vantardises sont la règle. Et où, l’alcool aidant, les susceptibilités sont toujours promptes à s’ exacerber.

Mais un jour, en rentrant à leur camp, ceux de Longeverne s’inquiètent de ce qu’ils sont survolés par une bande de corbeaux croassant et trouvent leur cabane dévastée et le trésor volé : Ils ont été trahis. Le renégat est rapidement démasqué, impitoyablement puni et un peu plus tard le trésor récupéré. Mais l’épopée est terminée, et le livre aussi

Le corbeau, oiseau d’Odin mais aussi oiseau de Lug. Oiseau du soleil et de la lumière en même temps que celui des ténèbres et des mystères. Symbole de connaissance. Il a toujours été plus ou moins considéré comme un augure. Il est dit qu’il était une fois (et par cette formule, on voit bien qu’on rentre de plain pied dans le mythe), sous le règne du grand roi Ambigatos… La Gaule était devenue si riche et si peuplée qu’il était devenu bien difficile de gouverner la masse de ses habitants. Ambigatos décida donc de faire partir ses neveux, en quête de nouveaux territoires (on dit aussi qu’ils étaient remuants et ambitieux et qu’il était donc plus prudent de les éloigner avant la mort du Roi). Acceptant de se soumettre au sort, ceux ci se rendirent chez un oracle, vivant à l’embouchure de la Loire, dont les deux corbeaux sacrés, par leur vol, leur assignèrent chacun une direction à prendre. Ségovèse partit vers l’est et la forêt hercynienne formant l’avant garde de ceux qui allaient en Asie Mineure fonder l’empire des Galates et Bellovèse vers l’Italie pour fonder la Gaule Cisalpine.

Les Gaulois n’étaient pas plus tendre que les autres peuples avec les déserteurs les traitres et les parjures et les moins coupables « n’étaient que » éborgnés ou essorillés…

Un dernier mot sur le titre que j’ai choisi : cet « à cul les Velrans« , le cri de guerre de ceux de Longeverne, correspond bien à cette exclamation gauloise « Cecos ac Caesar » : Merde à César !…. et donc par une analogie qui me tient, aujourd’hui, tout particulièrement à cœur (désolé pour le Hors Sujet apparent) : « Mort aux Cons !!! »

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vercingetorix

Après deux mois de siège,52 ans avant notre ère, Vercingetorix capitule à Alésia le 27 septembre. Les Gaulois sont vaincus et la Gaule est intégrée à l’ empire romain.

Selon Pierre Lance (« Alésia, un choc de civilisations »), « la défaite d’Alésia est une allégorie qui restitue l’image de toutes les défaites gauloises, tant militaires qu’idéologiques, jusqu’à 1940 inclusivement, mais qui, plus encore, symbolise toutes les défaites du Celte de toujours devant une « civilisation de l’artifice » et une « religion du système » qui, depuis plus de vingt siècles, trahissent toute espèce de nature et de réalité.

C’est la défaite de l’individualiste devant le collectivisme, du régionaliste devant le centralisme, du panthéiste devant le monothéisme, du spiritualiste devant le matérialisme, de l’Occidental devant l’orientalisme, du villageois devant la mégapole, du citoyen devant la bureaucratie, du créateur devant le technocrate, de l’artisan devant le robotisme, de la maison individuelle devant le grand ensemble … Que sais-je encore ! Bref, c’est la défaite de l’homme libre devant toutes les formes de tyrannie : politique, économique, spirituelle. En un mot c’est la défaite de l’Esprit.

C’est dire que cette défaite est celle de tous les hommes. Et c’est pourquoi elle exige la revanche sans laquelle on pourrait désespérer de l’avenir de l’humanité. (…)

Aujourd’hui, nous voyons s’élaborer de grands blocs humains dont certains dirigeants rêvent manifestement d’imposer leur loi à toute la planète, soit au nom d’idéologies ou de religions totalitaires, soit pour le seul goût du pouvoir, ou bien encore mus par un mélange de tout cela. Les hommes libres doivent donc, plus que jamais, se préparer à défendre, envers et contre tous, le droit sacré des individus et des peuples à disposer d’eux-mêmes, et, dans toute l’Histoire, aucun peuple ne sut mieux en affirmer les principes et en jeter les bases que nos ancêtres les Gaulois. »

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Il est absurde d’affirmer que le Druide était membre de la classe guerrière comme je l’ai lu récemment car c’est faux, comme d’ utiliser le mot en terme générique et de définir le barde et l’ovate comme deux de ses spécialisations, ce qui n’est qu’une hypothèse.

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C’est en partie à cause de Jules César que nous faisons une fixation sur le Druide, le barde et le vate ne devenant donc que les deux spécialités d’un même grand prêtre omnipotent et omniscient. Pourtant les autres auteurs comme César compilateurs de Poséidonios, et qui parlent des druides, Diodore de Sicile, Strabon et Ammien Marcellin laissent bien à penser que ces différentes fonctions correspondent bel et bien à des personnages différents et que les druides ne constituent pas, à eux seuls, l’ensemble du personnel religieux. Strabon, par exemple : « chez tous les peuples gaulois d’une manière générale, il y a trois catégories d’hommes qui sont exceptionnellement honorés : les bardes, les vates et les druides ».

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D’ailleurs les trois auteurs qui font cette distinction vont même jusqu’à respecter cet ordre précis… est-ce à dire que le druide serait le moins honoré d’entre eux ? Georges Dumézil affirme : «  [les bardes] forment à côté des druides une corporation non moins prestigieuse et souvent rivale ». Il est fort probable que le barde faisait partie intégrante de la société celtique depuis la nuit des temps pour la simple raison qu’il remplissait là une mission primordiale dans une société guerrière bien plus que le simple rôle de gentil troubadour qu’on veut bien d’ordinaire lui accorder : « vanter les vertus guerrières des vivants et des morts et prôner les valeurs héroïques » face aux hommes et face aux dieux. Le vate, selon Strabon, s’occupait  des cérémonies religieuses et pratiquait les sciences de la nature (incluse celle de la médecine) tandis que Diodore, plus précis, en fait un sacrificateur et un devin, doué sans doute du don de prophétie, ce qui permet là encore de situer sa présence quelque part dans la nuit des temps, auprès des rois quand ils perdirent à son profit, la pratique cultuelle.

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D’habitude si précis dans les détails, César semble, là, vouloir expédier le sujet en vitesse et cumule ces différentes fonctions dans les seules mains du druide. Ce qu’on appellera procéder par simplification… En revanche, il leur octroie le droit et la justice (et par extension les pouvoirs de « légitimité » et de « caution morale »)qui n’ont pas l’air de trouver leur place dans les attributions des bardes et des vates, tout ce qui concerne la vie publique et politique ainsi que l’enseignement et tout ce qui fait intervenir l’écriture …et il semble bien que là soient les attributions effectives du druide…

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Le druide n’est pas membre de la classe guerrière : c’est méconnaitre complètement le modèle tri-fonctionnel sur lequel fonctionne la société celtique que de le croire. Le roi et le druide se partagent les honneurs et les devoirs de la première fonction (« administration mystérieuse et régulière du monde, souveraineté, puissance sacerdotale, magie droit, politique, science, sagesse, qualités de l’homme mûr »), mais le druide n’est pas le premier personnage de la société celtique, c’est le roi, même si ce dernier ne parle qu’en second lieu et s’il a impérativement besoin de la présence du premier. Tandis que les membres de la classe guerrière sont ….. les guerriers… C’est là un fonctionnement typiquement indo-européen.

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De son côté, César est formel : les druides ne vont pas à la guerre, ils sont exempts du service militaire… mais rien n’indique que se battre leur est interdit. On sait qu’ils pouvaient, entre eux, en venir aux armes en cas de désaccord sur la désignation du Grand Druide. Mais pour ce qui est des guerres, il est probable, au contraire, qu’ils intervenaient avant la bataille pour essayer de réconcilier les parties (sauf peut être dans des conditions extrêmes comme la révolte des Gaulois derrière Vercingetorix où il est usuel de présenter l’Arverne comme « l’homme des druides »: pourtant César écrit qu’il se fait livrer Gutuater comme « principal coupable et auteur responsable de la guerre » en l’employant comme si c’était un patronyme alors qu’il semble bien que « Gutuater » désignait le personnage procédant aux sacrifices). S’ils n’y parvenaient pas, les bardes, endossaient alors le rôle qui était le leur dans la coutume pour un combattant de se mettre en valeur par rapport à son adversaire, et, à côté des insultes des belligérants, devaient réciter les arbres généalogiques glorieux et chanter les louanges de leurs « maîtres »…

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Le druide se devait quand même de porter une arme s’il était une personnalité publique et Diviciacos, le seul druide cité par César, et donc le seul druide de l’Antiquité dont l’existence est avérée, n’y manque pas quand il se présente devant le Sénat romain : c’est parce qu’il est en même temps le chef politique des Eduens et qu’une coutume veut que les Gaulois traitent des affaires publiques en armes …

La scène est jolie, on est nombreux à l’avoir encore en mémoire : « prêtons serment devant nos dieux », s’écrient les Gaulois, frissonnant d’ardeur guerrière à l’aube d’une bataille qui s’annonce décisive : « pas d’asile sous un toit, pas d’accès auprès de ses enfants, de ses parents, de sa femme, pour celui qui n’aura pas deux fois traversé à cheval les rangs ennemis ». On connaît la suite, les auxiliaires Germains interviennent, bousculent la cavalerie gauloise, et font grand carnage aussi dans les rangs de l’infanterie… les survivants suivent Vercingetorix, et se replient sur Alésia … C’en est pour ainsi dire fini de l’indépendance gauloise …

cheval-gaulois

Le cheval a toujours tenu une grande place dans la vie des gaulois, au point de figurer sur leurs pièces de monnaie. On dit que la cavalerie était un élément essentiel de leur puissance militaire. Lors de la guerre des Gaules, les effectifs engagés étaient énormes, ce qui supposait un élevage de chevaux très actif. Ils sont aussi consommés par les habitants ou sacrifiés aux dieux. La plupart de ceux qu’on a retrouvés, ont été abattus en fin de croissance mais il arrive qu’on découvre dans des fouilles les ossements de chevaux adultes parfois âgés, qui ont été utilisés comme bêtes de somme.


Les statures des animaux, vaches, chevaux entre 110 et 130 cm au garrot, porcs et moutons sont plus faibles que celles de nos formes actuelles. L’écart, variable selon les animaux et les races peut aller jusqu’à 0,50 m si l’on compare le cheval gaulois moyen avec nos chevaux de selle actuels. En contrepartie de cette rusticité, ces petits animaux devaient être assez résistants. L’élevage du cheval contribuait pour beaucoup à la réputation du paysan gaulois et on n’oublie pas qu’Epona, une des déesses les plus populaires et la seule déesse gauloise intégrée dans le panthéon romain était toujours représentée en compagnie d’un cheval. Les aristocrates gaulois (les equites) servaient à cheval dans la cavalerie et l’usage permanent des chariots exigeait un grand nombre de chevaux de trait.


Pourtant, dès le IVe siècle, les Gaulois qui combattent à l’étranger découvrent les grands chevaux méditerranéens, bien différents des chevaux indigènes qui correspondent donc à nos poneys ou doubles-poneys actuels, et s’en prennent de passion…Et, nous dit César, « les acquièrent à n’importe quel prix ». Des élevages gaulois vont bientôt produire eux mêmes de tels animaux : au moment de la guerre des Gaules, affirment certains spécialistes, une bonne partie des chevaux employés par les gaulois étaient probablement de grands sujets.


Bon ça paraît simple comme ça, mais en fait ça ne l’est pas … il y avait certainement coexistence de différentes races et une distinction était respectée dans les usages. Le cheval de guerre n’était certainement pas celui que l’on sacrifiait communément dans les sanctuaires ! D’autre part, on remarque que la principale source d’information sur les Gaulois de l’époque, César, ne fait aucune description précise de cette fameuse cavalerie gauloise, alors qu’il s’attarde sur la tactique utilisée par les Germains. On se demande bien pourquoi alors qu’ habituellement, il n’est pas avare de détails et qu’on connaît, par exemple, l’existence de la cavalerie personnelle de Dumnorix, le chef éduen, qu’il entretenait à ses frais et mettait à disposition de l’Etat moyennant très certainement finances…. On pense aussi aux huit chevaux trouvés, inhumés entre -160 et +120 , dans une tombe près de Clermont Ferrand avec leurs cavaliers (des morts de la bataille de Gergovie qui a eu lieu à une poignée de kilomètres ?) dans une mise en scène funéraire très particulière, et qui mesurent 120 cm au garrot…

tombe-chevaux-gaulois1

En fait, il est également tout à fait possible que les riches gaulois ne se soient lancés dans l’élevage de chevaux de grande taille que sous l’occupation romaine et que cet élevage nouveau n’ait pas résisté à la chute de l’Empire romain puisque la plupart des sites du haut Moyen Age ne livrent que des animaux qui rappellent ceux de l’âge de fer . La norme sera de 1,30 m au garrot jusqu’au IIIe siècle et on dit même que Rollon, le chef normand qui allait devenir le premier duc de Normandie, au IXe/Xe siècle, avait du mal à trouver un cheval à sa taille pour que ses pieds ne touchent pas par terre…

Le mystère reste entier…

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Biblio:

Denis Bogros : Des hommes, des chevaux, des équitations

Jean Louis Brunaux : les Gaulois . Belles Lettres

Jean Louis Brunaux : Guerre et religion en Gaule. Errance

Jean Louis Brunaux/Bernard Lambot : Guerre et armement chez les Gaulois. Errance

César : Guerre des gaules

Renée Grimaux : Nos ancêtres les Gaulois. Ouest-France

François Malrain : Les paysans gaulois. Errance

Patrice Méniel : Les Gaulois et les animaux. Errance

Régine Pernoud : Les Gaulois. Seuil

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