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Savitri Dévi

Savitri Devi (« déesse de l’énergie solaire » en hindou) est le nom de plume adopté par la Française Maximine Portas (1905-1982). Fervente partisane du nationalisme indien (Hindutva) auquel elle livre un apport critique (exemple des pays se modernisant pour contrer le colonialisme et rôle supra-religieux des institutions), et admiratrice d’un pays traditionnellement polythéiste, dernier bastion selon elle du « paganisme aryen » (celui-là même supplanté en Europe par le christianisme levantin), elle entendait par son exemple défendre la possibilité d’une reconquête de l’Europe par le paganisme, dont elle estimait le national-socialisme porteur.

Elle est née le 30 septembre 1905.

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L’organisation de la société corporative que nous connaissons -bien mal d’ailleurs- sous le nom de système des castes, devait assurer à chaque élément de population un gagne pain inviolable et le droit de maintenir ses croyances, ses institutions sociales et civiles, ses dieux,ses fêtes, ses coutumes. C’est ce système qui a permis à la civilisation aryenne d’assimiler et d’utiliser tous les peuples conquis sans les détruire, sans se dissoudre en eux et sans leur imposer de changement notable dans leurs institutions, leurs croyances et leur mode de vie.

Au cours du temps , les races d’hommes apparurent qui n’ont rien de commun les unes avec les autres et dont les caractéristiques furent déterminées par l’état du monde au moment de leur apparition, c’est à dire qu’elles étaient en progression descendante, les dernières apparues étant les moins évoluées. La première des races, celle des hommes supérieurs, était blanche, la deuxième était rouge, la troisième était jaune, la quatrième était noire. Ces quatre races seront, par leurs aptitudes, l’origine des quatre castes, la race blanche deviendra la race des brahmanes, des prêtres, la race rouge celle des guerriers et des rois, la race jaune celle des cultivateurs et des marchands, la race noire celle des artisans.

L’un des principaux problèmes du monde est de faire face à la réalité des races, d’aider à leur développement, de leur permettre de coexister et de coopérer , tout en évitant leur mélange, de donner à chacune les avantages nécessaires à son bonheur, son équilibre et son progrès intellectuel et spirituel sans donner en même temps ces avantages à d’autres à qui ils seraient nuisibles. Les besoins des hommes diffèrent comme ceux des oiseaux, des bovins et des lions.

L’état primitif naturel aux hommes semble pouvoir être ramené à deux genres principaux, suivant leur race et leurs origines, la tribu et le village, qui proviennent de deux formes de société nomade ou sédentaire, et qui sont respectivement patriarcale et matriarcale. Ces deux genres de société naturelle restent toujours la base de notre comportement. Nous retrouvons dans beaucoup de nos façons de penser la mentalité de la tribu. C’est ainsi que l’homme se considère instinctivement comme faisant partie d’un groupe. Il crée sur tous les plans des groupements qu’il oppose violemment à d’autres. Il se proclame Français ou Allemand, Républicain ou Démocrate…

L’autre caractéristique de la société humaine est le village. Elle apparait dès l’instant où une division du travail ou une spécialisation devient nécessaire. Les groupements humains sont alors divisés, non point en des groupements équivalents ou opposés, mais en couches superposées qui se partagent les différentes fonctions sociales

Les principes qui ont servi de base à la société hindoue représentent un essai de constitution d’une humanité stable basée sur la reconnaissance de la nécessité d’une division stratifiée, mais cherchant à faire une place équitable à chaque groupe de façon que chacun reçoive des privilèges équivalents mais d’ordre différent correspondant à des responsabilités, des devoirs et des fonctions différentes. Ainsi chaque groupe a ses notables, ses techniciens, ses experts, ses apprentis, ses fêtes, ses cérémonies, ses droits de légiférer et de rendre la justice. Il a conscience des valeurs qu’il représente par rapport aux autres groupes sociaux

C’est pour faire face à tous les problèmes que représente une société multiraciale que les législateurs hindous s’efforcèrent d’établir les règles de coexistence qui aboutirent au système des castes. Il s’agissait en fait de reconnaître pour chaque groupe et chaque individu le droit d’être « différent » ce qui est, en fait, le seul critère valable de la liberté.

Les législateurs ont cru voir dans la diversité des races, la hiérarchie des castes, la diversité des fonctions, une expression de la nature et de l’espèce humaine et un reflet du plan divin qu’il fallait chercher à comprendre et auquel on avait tout intérêt à se conformer car c’est seulement à travers lui que nous arriverons à notre plein épanouissement et à la réalisation des quatre sens de la vie

Comme pour les quatre âges de la vie, les quatre castes reflètent les quatre âges de l’humanité et dans chaque caste l’un des buts de la vie devrait prédominer. C’est pourquoi dans la caste artisanale (race noire) l’érotisme prédomine, dans la caste marchande (jaune), c’est la propriété, l’argent, dans la caste royale (race rouge) le courage et le devoir et dans la classe sacerdotale (blanche) la vie spirituelle et intellectuelle.

A l’intérieur de chacune des castes se reforment, suivant les aptitudes des individus, quatre sous-castes subdivisées en de nombreuses catégories correspondant à des groupes corporatifs, raciaux, religieux, professionnels indépendants.

Les différentes castes sont définies en termes de devoirs, jamais de droits. La caste dans la société hindoue est une entité à la fois raciale, familiale, religieuse et professionnelle, caractérisée par un système de sélection raciale différent pour chaque caste (mariages à des degrés de consanguinité différents), un système d’éducation différent, un système d’alimentation différent (végétarien ou non-végétarien) et une morale différente.

Il existe toutefois, dans la société hindoue, un moyen pour l’individu qui a des dons particuliers de sortir de sa caste mais ce ne peut être fait qu’à titre personnel et non pas sur le plan social pour en tirer des avantages matériels. L’individu d’exception n’a droit à une place d’honneur que s’il renonce à créer une lignée. Il peut donc revêtir la robe monastique du sannyasi ou s’adonner à l’étude, aux sciences, aux arts, aux lettres, à la philosophie mais sans en faire exactement un métier et sans entrainer sa famille hors de la profession familiale.

Il a toujours existé dans l’Inde »’ un certain nombre de hors-castes qui ont posé certains problèmes : les individus rejetés de leur caste pour cause de méconduite ; certains groupes étrangers ou tribus primitives non assimilées ; des individus ayant des professions considérées comme malpropres et qui ne peuvent donc se mêler aux autres.

Mais en réalité, le problème de l’intouchabilité a été généralement présenté à contresens. C’est le Brahmane de par ses fonctions sacrées et ses obligations de pureté rituelle qui ne doit touche personne. Chacun s’écarte donc de lui avec respect pour ne pas l’obliger à des purifications constantes et pénibles impliquant parfois des jeûnes prolongés

Si la loi hindoue exclut ces pariahs de certains rapports sociaux, elle cherche en revanche immédiatement une place à leur faire, une occupation à leur réserver, à leur créer des fêtes, des dignités, des responsabilités. Presque toute la société européanisée de la Nouvelle Delhi qui gouverne aujourd’hui l’Inde est en fait du point de vue hindou une société de pariahs.

On reproche maintenant à la société hindoue la manière dont elle traite certaines castes artisanales et des tribus aborigènes, les tenant à l’écart et réduisant les contacts sociaux entre elles et le reste de la population aux rapports professionnels. Peu de gens réalisent que ceci est la seule façon de permettre à certaines races et à des formes très anciennes de culture et de religion de survivre et prospérer dans un monde différent d’elles.

Des conditions de vie telles que celles des bidonvilles en France ou des bas quartiers des États-Unis sont impensables dans le système hindou traditionnel ou chaque groupe ethnique, chaque profession fut-elle la plus humble, a des droits et des privilèges. Elles apparaissent seulement dans le cadre hybride des cités modernes de type occidental.

Source : Alain Daniélou, Les Quatre Sens de la vie.

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Jean Claude Carrière et Peter Brook sont en Inde pour un travail préparatoire au « Mahabharata »… La scène se passe le 5 février 1983 et est relatée par JC Carrière dans son livre « Dictionnaire amoureux de l’Inde » :

« Plus haut nous trouvons un petit temple en ruine, au milieu même de la forêt. Tout ce que nous cherchions. Un terre-plein, de six mètres sur quatre, est entouré d’une terrasse où on peut s’asseoir.

Nous prenons un moment de pause. Il fait chaud malgré l’altitude. Peter Brook demande à chacun de partir seul dans la forêt pendant une vingtaine de minutes, et d’en ramener un objet qui l’aura particulièrement frappé. Ce que nous voudrons.

Sitôt fait. Nous partons et nous revenons un peu plus tard, ramenant un caillou, une feuille, une branche,une pincée de terre,un morceau de fruit, une longue palme, un bout d’écorce, un insecte mort.

Au centre de notre terrasse délabrée, nous entassons tous ces objets. Et nous commençons nos exercices quotidiens, d’abord vocaux, puis physiques. Spectacle probablement étrange même en Inde : vingt cinq hommes et femmes, européens, africains, avec aussi un japonais, un Balinais, la plupart dans des vêtements singuliers, en train de s’égosiller en pleine forêt, de transmettre des signaux, des gestes, des improvisations, des fragments de textes.

Aucune forêt indienne n’est déserte. Des paysans, des bucherons passent auprès de nous, regardent le groupe avec curiosité, s’arrêtent, puis repartent.

Tout à coup une femme s’approche, une paysanne. Sans hésitation elle dépose sur le sol son fardeau, franchit les quelques marches de la terrasse, sans un regard pour nous, et s’allonge entièrement sur le sol, les deux bras étendus devant elle, les mains jointes en direction du tas d’objets divers que nous avons rapportés, un moment plus tôt, de la forêt.

Elle a vu en passant ce qui ressemblait à une offrande, elle est venue spontanément y rendre hommage.

Nous restons silencieux, le souffle retenu. Nous osons à peine la regarder.

Simplicité, omniprésence d’une ferveur. Décision soudaine de sacraliser ceci ou cela. On dirait un souhait très particulier de bienvenue.

La femme reste environ une minute, allongée sur le sol en silence au milieu de nous. Nous n’entendons d’elle qu’un murmure. Puis elle se redresse, sort du groupe (toujours sans un mot) et s’éloigne avec son fardeau dans la forêt. »

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Haridwar, ville sainte dans le nord de l’ Inde où il y a 8 ans je me suis immergé selon le rite trois fois dans le Gange…

à Haridwar aujourd’hui, dix millions de pèlerins hindous et des centaines d’ascètes nus couverts de cendres se sont baigné dans les eaux sacrées du Gange pour l’un des plus importants festivals religieux au monde… et païen qui plus est …

La date, choisie par les astrologues, est le jour du « principal bain royal » du « Kumbh Mela », un festival haut en couleurs de 104 jours qui se tient en Inde tous les trois ans et permet aux hindous de se laver de leurs péchés et d’interrompre le cycle de la réincarnation en s’immergeant dans le Gange.

Cette fête païenne commémore une bataille de la mythologie hindoue entre les dieux et les démons se disputant une cruche remplie du nectar de l’immortalité. Lors de la bataille, quelques gouttes tombèrent dans quatre endroits différents: les villes d’Allahabad, Haridwar, Ujjain et Nasik. Le « Kumbh Mela » alterne entre ces quatre villes.

« Etre ici pour le jour du principal bain royal, c’est le temps fort de ma vie », résumait Nikunj Beriwal, 51 ans, venu de l’Etat du Bengale occidental (est), à des milliers de kilomètres de la ville sainte d’Haridwar, située là où le fleuve dévale les montagnes de l’Himalaya avant de continuer une course longue de plus de 2.500 km.

Selon le porte-parole de l’organisation du festival, Ashok Sharma, « plus de 10 millions de personnes ont commencé à se baigner aujourd’hui .

Selon les organisateurs, plus de 40 millions de pèlerins ont foulé les 187 ghats –larges esplanades menant au Gange– depuis le début du « Kumbh Mela » le 14 janvier. Le festival se termine le 28 avril.

Après avoir voyagé dans des camions, des bus et des trains bondés, des familles entières représentant toutes les castes et tribus de la société indienne se pressaient sur le site de 130 km2 dans une ambiance de ferveur religieuse, avec parfois pour tout bagage un maigre baluchon.

Des centaines de « Naga Sadhous », des ascètes nus et couverts de cendres, qui se considèrent comme les gardiens de la foi hindoue et vivent isolés dans les montagnes de l’Himalaya, ont entrepris leur bain rituel dans un même élan, brandissant des tridents, des épées et des crosses avant de se jeter dans l’eau .

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Merci à ElleN qui vient me rappeler que se fête actuellement chez nos frères indiens la Holî, fête du printemps.

La Holî – parfois appelée fête des couleurs ou Phâlgunotsava – est la fête hindoue de l’équinoxe de printemps. Elle trouve son origine dans la Vasantotsava, à la fois un sacre du printemps et célébration de la fertilité. Il est fêté dans toute l’Inde durant deux jours au cours de la pleine lune du mois de Phâlguna qui se situe en février-mars. La Holî est dédiée à Krishna dans le nord de l’Inde et à Kâma dans le sud. (Wikipédia)

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Encens

« Sortez délicatement une baguette de santal, allumez-la de la main droite, éteignez-en la flamme non en soufflant dessus , mais en secouant doucement la baguette, piquez la dans sa coupelle, asseyez-vous, faites silence. Elle est là, tremblotante, toujours près de se briser, grosse en sa gracilité de tous les miracles qu’elle va dérouler devant vous. Toute émue au seuil de l’offrande.

Légère, une fumée bleutée commence à s’élever dans l’air. Elle forme de len tes volutes qui s’embrassent, se déprennent, de capricieuses arabesques, des cortèges de profils changeants, des noeuds qui se dénouent d’eux mêmes.

La baguette de santal a pour page l’espace. Alors que jamais ne bouge sa plume de lumière, la phrase qu’elle trace n’est jamais la même. Vous regardez monter ces arborescences maniérées qui semblent enserrer d’invisibles colonnes d’air, ou comme les fins rinceaux de cornaline escaladent de leurs courses les neiges du Tâj-Mahal. Vous suivez l’évolution de ces flexibles déploiements, de ces subtils ballets de symboles. Et vous vous demandez quels peuvent être ces débris d’un mystère incohérent, dont vous ne saisissez pas l’évasive identité.

A peine une respiration plus forte, et toute l’architecture s’effare, se cabre, s’effondre, court se recomposer ailleurs. Vous regardez errer le rêve.

Vous découvrez bientôt cette danse insaisissable, toujours renouvelée, cette danse est un parfum. Vous devinez que toutes ces formes reproduisent les lettres de l’alphabet sanskrit, et sans doute de beaucoup d’autres -il suffit d’être assez vif pour savoir les lire au vol-, les centaines d’attitudes du corps humain durant l’amour, le jeu chorégraphique, la gymnastique sacrée, toutes les espèces de feuilles, toutes les corolles de la grande forêt, toutes sortes d’animaux, et tous les ornements des chapiteaux des temples.

Pour peu que vous observiez encore, vous vous direz que tous ces gracieux accidents de fumée miment et dansent les pensées, les songeries de l’esprit, que la tige odoriférante ressemble à un stylet tranquille ciselant le vide déroulé devant lui, dessinant dans leurs plus précis frémissements les rivages découpés, les méandres de l’imaginaire; mais qu’elle décrit aussi les fines métamorphoses du devenir humain, et que, s’attardant en nostalgies, passant par des phases d’exaltation et d’abattement, c’est votre vie qu’elle vous raconte.

Mais telle est bien aussi l’image du devenir universel. car tandis qu’elle se consume lentement, vous verrez la baguette inscrire les cycles de l’éternité, qui se développent, s’harmonisent, se défont aux angles du destin, se réinventent sans cesse sous l’immobile bourrasque de l’Esprit, renaissent de leur propre évanouissement.

Jusqu’au moment où, dans l’obscurité tombée, ne brille plus devant vous qu’une goutte de lumière imperceptible comme le trou d’une serrure donnant sur l’autre monde. Le dernier soupir du santal trace un point d’interrogation au-dessus d’une traînée de cendre, et la baguette s’éteint au même instant que s’achève la dissolution cosmique.

Il suffit d’en cueillir une autre pour y allumer un nouvel univers ».

Jean Biès : « Les chemins de la ferveur ».

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« En Inde, c’est comme si toute l’âme de la vieille Europe oubliée, de l’Europe païenne et classique, étouffée depuis longtemps était là, immortelle, transposée dans une civilisation de pays chaud. A quelque chose près, voilà à quoi cela devait ressembler, les processions de la Grèce antique et ses fêtes ! Sans doute, des défilés de femmes et de jeunes filles, drapées avec la même élégance que celles-ci, dans la demi-obscurité d’une salle aux piliers sculptés, dans laquelle flotte un parfum d’encens; portant des offrandes comme celles-ci, et à peu près les mêmes offrandes; belles, sans doute -comme celles-ci ! Voilà ce qu’il devait être, plus ou moins, ce culte aboli que l’empereur Julien, venu trop tard, fit d’inutiles efforts pour rétablir ! »

Savitri Devi Mukherji

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C’est exactement ce qu’on se disait avec O. pour la rencontre de la Lugnasad, en évoquant les petits temples indiens dans lesquels s’activent les fidèles, les odeurs et les couleurs, les étals croulant sous les offrandes, encens, couronnes de fleurs, les grains de poussière jouant dans les rayons de lumière qui trouent la semi pénombre … comme tout cela fait paraître bien vaines nos préoccupations d’aujourd’hui, nos démonstrations d’égotisme … l’Inde, où il n’est nul besoin d’avoir recours aux citations d’auteurs classiques pour sentir que les dieux vivent encore, là…

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« Je vois souvent le monothéisme comme un fourre-tout, où les forces anciennes ont été réduites en bouillie pour n’en faire qu’une, où mille diversités vivantes, de force, sont devenues une abstraction. Or je ne peux pas adorer un dieu inutile et inconnaissable, d’autant plus que je sais -les historiens nous le montrent en détail- comment il est né, comment nous l’avons inventé, construit, imposé. Comment dans la suite des siècles, divers peuples ont revendiqué la paternité de ce père, au point de se déchirer en son nom, car l’un est plus difficile à partager que le multiple. Un dieu qui, dans la plupart des cas, outre que nous l’affirmons inconcevable, se montre obscur et malveillant -atroce même, lorsque des assassins se réclament de lui, qui les laisse faire.
En revanche, pour peu que l’on m’y convie, je suis tout prêt à adorer une source, ou un arbre, ou un volcan, ou un rocher s’avançant dans la mer. C’est là que je trouve, aujourd’hui plus que jamais, et en Inde plus que partout aillleurs, la vraie beauté et l’humanité du paganisme. Il ne s’agit pas d’un désordre naïf, comme on a voulu nous le dire, mais d’un attachement renforcé à la planète qui nous fit naître, et qui de ce fait nous semble sacrée. Il s’agit de ramener tous les sentiments à la terre au lieu de les égarer dans le ciel. Le polythéisme est ainsi le contraire de la transcendance, que les Indiens tiennent pour une absurdité. Pourquoi, par quel délire dangereux, imaginer une réalité dans l’irréel par excellence ? »

Jean Claude Carrière : Dictionnaire amoureux de l’Inde. Plon
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Quelques précisions pour compléter ce que j’avais écrit sur l’Inde (voir : « violences en Inde: je plaide la légitime défense »: https://lecheminsouslesbuis.wordpress.com/2008/08/29/violences-en-inde-je-plaide-la-legitime-defense/ ), il faut savoir que le christianisme n’y est pas unitaire et y « travaille » dans la plus parfaite concurrence. Par exemple, les missionnaires qui ont opéré des conversions au Kerala, l’ont fait contre la volonté des chrétiens de Saint-Thomas, qui voyaient d’un très mauvais oeil entrer dans le christianisme des groupes de castes inférieures, avec lesquelles ils ne voulaient pas frayer et ne voulaient pas être confondus. D’autre part, des congrégations missionnaires syro-malabares, qui travaillent en Inde du Nord, loin de leurs bases, s’y heurtent à des congrégations latines. Et quand les ouailles choisissent d’aller vers les unes c’est autant de perdu pour les autres ce qui crée des tensions entre les groupes.

A cette concurrence parfois féroce, il faut ajouter l’activisme de groupes évangéliques, souvent pentecôtistes ou pentecôtisants, et dont l’importance ne réside peut-être pas simplement dans le nombre de fidèles qu’ils convertissent, mais surtout dans l’exacerbation du débat autour des conversions et du prosélytisme.

A ce sujet là, en Inde, on se trouve face à des conceptions totalement différentes. De façon générale, l’idée qu’on ne se convertit pas est partagée universellement par les hindous. C’est une incompréhension totale: on est né là, on est hindou par son groupe d’appartenance, on n’a pas à changer de religion. Mais ce prosélytisme chrétien, tellement présent et « insistant » que dans certains Etats de l’Union indienne, des lois ont du être votées pour le réguler et l’endiguer, s’accompagne la plupart du temps d’un prosélytisme sécessionniste, surtout dans les états du Nord-Est qui sont le plus souvent ceux qui sont le théâtre des troubles.

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L’autre dimension du phénomène de la conversion est donc politique: « Pour des raisons historiques, le christianisme est perçu comme une religion étrangère, associée à des puissances étrangères, pouvant potentiellement mettre à mal l’équilibre indien, l’équilibre social, et, en convertissant des populations en marge et sur les frontières, peut-être aussi mettre en danger l’intégrité du territoire national. Les tribaux sont des populations qui, par définition, n’ont pas la même perception de la nation que les membres des castes. Elles ont parfois des aspirations sécessionnistes, qui de fait se mêlent au christianisme: on croit donc déceler, derrière les pratiques du prosélytisme, des visées politiques. Cela constitue la toile de fond de certaines attitudes hostiles ».(Catherine Clémentin-Ojha, auteur de « Les Chrétiens de l’Inde. Entre castes et Eglises », Albin Michel.)

Après quelques jours de violences antichrétiennes dans l’Orissa, Etat de l’est de l’Inde, on comptait, jeudi 28 août, une dizaine de morts, toutes confessions confondues, et quelques 25 églises incendiées, sans compter les écoles et les centres de santé tenus par des chrétiens.

Alors les bonnes âmes s’indignent, vitupèrent contre ces méchants extrémistes hindous, ces horribles païens (mais oui madâââme, ce sont des … païens…) on imagine déjà les sectateurs de Kâlî, enturbannés, les yeux fous et la barbe tressée, aux trois quarts nus se répandre dans les rues brumeuses pour jouer du lacet à noeud coulant sur tout ce qui bouge…

On réagit « vivement » au Vatican (oui, oui, vous avez bien lu, c’est le Vatican qui réagit vivement, celui là même auquel on peut imputer tant de massacres…) et le « Courrier International » (on devrait plutôt dire « la Propagande Internationale ») n’hésite pas à titrer que « Les chrétiens subissent la folie meurtrière des nationalistes hindous »…

Je plaide, moi, la légitime défense …

Car il faut dire que, si elles sont bien menées par des hindous, ces émeutes ont éclaté au lendemain de l’assassinat, samedi 23 août, d’un religieux hindou, Laxmanananda Saraswati, 85 ans, membre du groupe fondamentaliste VHP (Conseil mondial hindou), et de quatre de ses proches, lors de l’attaque de son ashram par, selon les témoignages, entre une vingtaine et plus d’une centaine d’assaillants, équipés de grenades et de fusils et tirant à l’aveuglette. Le religieux et ses proches ont été littéralement hachés en morceaux. Laxmanananda Swami Saraswati avait échappé l’an dernier à un attentat et ses disciples ont souvent eu à se défendre d’attaques de chrétiens par le passé. Si certains tentent de mettre l’attentat sur le dos de maoïstes, le religieux avait reçu la veille une lettre le menaçant de mort s’il ne cessait pas de s’opposer aux missionnaires chrétiens.

Il était en effet connu pour ses campagnes virulentes contre les « conversions » au christianisme d’hindous de basses castes (« dalits ») et d’aborigènes (« tribals ») marginalisés. Dans ces efforts de conversion, l’Eglise catholique a toujours porté une attention particulière aux membres des groupes minoritaires : les tribus visées ici représentent entre 10 et 15% de la population indienne. Ils font partie des groupes les plus marginalisés . On se souvient que dans l’Antiquité, le christianisme qui se développait dans l’Empire visait les esclaves, les prostituées (et gitons), les marginaux, les pérégrins (= métèques en Grèce) et les orientaux en général…

Les extrémistes hindous affirment que des milliers d’hindous ont été trompés pour devenir chrétiens, car ils ont été attirés par des incitations financières. Ils accusent les missionnaires chrétiens de profiter de l’ignorance de ces populations, très souvent analphabètes et très pauvres et de ne pas hésiter à adopter des comportements provocateurs. Et malgré leurs dénégations, les activités agressives et peu respectueuses des cultures locales des Eglises chrétiennes alimentent le ressentiment des indiens fidèles à leurs traditions.

Je plaide moi la légitime défense…

Et si on leur foutait la paix. Si on arrêtait de leur dire que leurs croyances millénaires ne valent pas tripette et ne sont qu’un prélude à la révélation de la vérité par le Christ. Si on arrêtait de leur dire qu’ils sont des sous développés spirituels. Si on arrêtait de les emmerder avec l’Evangile et les promesses de vie éternelle. Si on arrêtait de les menacer des punitions infernales. Si on arrêtait de les terroriser. Si on arrêtait de les tuer …

Je plaide la légitime défense…

Pour ceux qui pensent que les missionnaires sont de l’histoire ancienne: dans les années 60, le second concile de Vatican répète que l’église « est missionnaire de par sa nature même puisqu’elle tient son origine de la mission du Fils et de la mission du Saint Esprit selon les desseins du Père ». Il est donc clair qu’il ne doit pas y avoir de relâchement et que l’évangélisation doit se poursuivre jusqu’au bout pour le bénéfice de tous (même si ce doit être en dépit ou contre ces « tous »). D’où, depuis les origines, la mise en oeuvre de plus de 700 plans pour évangéliser le monde.

Le fonctionnement de l’ensemble du christianisme, dans les années 80 coûtait 145 milliards de dollars et était assuré par 4,1 millions de travailleurs chrétiens à plein temps. L’entreprise christianisme possédait alors 13 000 bibliothèques importantes, publiait 22 000 périodiques, émettait 4 milliards de tracts par an et dirigeait 1800 stations de radio et de télévision chrétiennes. Dans ce christianisme organisé, c’est l’activité missionnaire qui est le programme principal . Quatre mille organisations missionnaires faisaient fonctionner un système énorme de mission chrétienne mondiale avec un personnel de 262 300 missionnaires coûtant 8 millions de dollars par an. Et en plus, les indiens doivent en même temps faire face à toutes les tentatives de conversion menée par les tenants de l’Islam…

C’est tout à l’honneur des « nationalistes » hindous que de prendre l’initiative de la résistance…

Je plaide la légitime défense …

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